Sommaire
ILa fableIILe conteALe merveilleuxBLe conte de féesCLe conte philosophiqueIIILe théâtreAGénéralités1Définition2Les didascalies3Les répliques4La composition d'une pièce de théâtreBLa tragédie1Définition2Les procédés du tragiqueCLa comédie1Définition2Les procédés comiquesDLa tragi-comédieELe drameIVLe romanADéfinitionBLe roman réalisteCLe roman naturalisteDLe roman d'anticipation ou de science-fictionELe roman contemporain1Le roman à portée philosophique2Le roman autobiographique ou d'autofictionVLa nouvelleAGénéralitésBLa nouvelle réalisteCLa nouvelle naturalisteDLa nouvelle fantastiqueVILa poésieADéfinitionBLa poésie lyriqueCLa poésie satiriqueDLa poésie épiqueELa poésie didactiqueVIIL'essaiVIIILe pamphletIXLe genre journalistiqueLa fable
Fable
Le mot fable vient du latin "fabula" qui signifie "parler". Il s'agit d'un court récit souvent en vers qui a une valeur moralisatrice.
La Fontaine est le plus célèbre auteur de fables français. Il met très souvent en scène des animaux.
Les fables ne sont pas ce qu'elles semblent être ;
Le plus simple animal nous y tient lieu de maître.
Une morale nue apporte de l'ennui :
Le conte fait passer le précepte avec lui.
En ces sortes de feinte il faut instruire et plaire ;
Et conter pour conter me semble peu d'affaire.
C'est par cette raison qu'égayant leur esprit,
Nombre de gens fameux en ce genre ont écrit.
Tous ont fui l'ornement et le trop d'étendue.
On ne voit point chez eux de parole perdue.
Phèdre était si succinct qu'aucuns l'en ont blâmé ;
Ésope en moins de mots s'est encore exprimé.
Mais sur tous certain Grec renchérit, et se pique
D'une élégance laconique ;
Il renferme toujours son conte en quatre vers ;
Bien ou mal, je le laisse à juger aux experts.
Voyons-le avec Ésope en un sujet semblable.
L'un amène un chasseur, l'autre un pâtre, en sa fable.
J'ai suivi leur projet quant à l'événement,
Y cousant en chemin quelque trait seulement.
Voici comme, à peu près, Ésope le raconte :
Un pâtre, à ses brebis trouvant quelque mécompte,
Voulut à toute force attraper le larron.
Il s'en va près d'un antre, et tend à l'environ
Des lacs à prendre loups, soupçonnant cette engeance.
Avant que partir de ces lieux :
"Si tu fais, disait-il, ô monarque des Dieux,
Que le drôle à ces lacs se prenne en ma présence,
Et que je goûte ce plaisir,
Parmi vingt veaux je veux choisir
Le plus gras, et t'en faire offrande."
À ces mots sort de l'antre un Lion grand et fort ;
Le Pâtre se tapit, et dit à demi mort :
"Que l'homme ne sait guère, hélas ! ce qu'il demande !
Pour trouver le larron qui détruit mon troupeau,
Et le voir en ces lacs pris avant que je parte,
Ô monarque des Dieux, je t'ai promis un veau :
Je te promets un bœuf si tu fais qu'il s'écarte".
C'est ainsi que l'a dit le principal auteur :
Passons à son imitateur.
Jean de La Fontaine
"Le Pâtre et le Lion", Fables, livre VI, Paris, éd. Barbin et Thierry
1668-1694
Le conte
Le merveilleux
Merveilleux
Le merveilleux est la rencontre entre le réel et le surnaturel, la magie.
Dans "Le Petit Poucet", les bottes de sept lieues sont magiques.
Le conte de fées
Conte de fées
Le conte de fées est un récit de fiction généralement bref. Il est issu de la tradition orale et plonge le lecteur dans un univers merveilleux.
"La Bergère et le Ramoneur", "Le Petit Chaperon rouge" et "Blanche-Neige et les sept nains" sont des contes de fées.
On reconnaît un conte aux éléments suivants :
- Le monde de la magie, l'irréel ou le surnaturel sont présents dans le conte.
- Le conte est souvent destiné aux enfants et a un sens moral caché.
- Les personnages des contes sont stéréotypés et se résument bien souvent à un trait de caractère.
- Le conte commence souvent pas la formule : "Il était une fois."
- Les lieux sont féeriques et enchanteurs : château, forêt magique, pays imaginaire, etc.
Alors, il se sentit honteux, et cacha sa tête sous son aile ; il ne savait comment se tenir, car c'était pour lui trop de bonheur. Mais il n'était pas fier. Un bon cœur ne le devient jamais. Il songeait à la manière dont il avait été persécuté et insulté partout, et voilà qu'il les entendait tous dire qu'il était le plus beau de tous ces beaux oiseaux ! Et le sureau même inclinait ses branches vers lui, et le soleil répandait une lumière si chaude et si bienfaisante ! Alors ses plumes se gonflèrent, son cou élancé se dressa, et il s'écria de tout son cœur : "Comment aurais-je pu rêver tant de bonheur, pendant que je n'étais qu'un vilain petit canard."
Hans Christian Andersen
"Le Vilain Petit Canard", (Den grimme ælling), Contes d'Andersen, trad. David Soldi, Librairie Hachette et Cie (1876)
1843
Le conte philosophique
Conte philosophique
Le conte philosophique est un récit qui peut avoir recours au merveilleux pour faire réfléchir le lecteur sur des enjeux philosophiques.
Candide de Voltaire fait réfléchir sur la définition du bonheur.
Il y avait en Westphalie, dans le château de M. le baron de Thunder-ten-tronckh, un jeune garçon à qui la nature avait donné les mœurs les plus douces. Sa physionomie annonçait son âme. Il avait le jugement assez droit, avec l'esprit le plus simple ; c'est, je crois, pour cette raison qu'on le nommait Candide. Les anciens domestiques de la maison soupçonnaient qu'il était fils de la sœur de monsieur le baron et d'un bon et honnête gentilhomme du voisinage, que cette demoiselle ne voulut jamais épouser parce qu'il n'avait pu prouver que soixante et onze quartiers, et que le reste de son arbre généalogique avait été perdu par l'injure du temps.
Voltaire
Candide, Genève, éd. Gabriel Cramer
1759
Le théâtre
Généralités
Définition
Théâtre
Le théâtre est un genre littéraire regroupant les œuvres littéraires écrites destinées à être jouées devant un public. On appelle ces œuvres des pièces de théâtre.
La Machine infernale de Jean Cocteau et Le Roi Lear de Shakespeare sont des pièces de théâtre.
Il y a deux grandes catégories dans le théâtre :
- La tragédie
- La comédie
Les didascalies
Didascalie
Les didascalies sont les indications de mise en scène que l'auteur écrit dans le texte d'une pièce de théâtre. Les didascalies ne sont pas prononcées par les personnages sur scène. Elles aident les comédiens pour leur jeu, et le metteur en scène pour les décors et les costumes.
LE SPHINX.
Chacun son tour.
(Œdipe compte. On sent qu'il se passe un événement extraordinaire. Le Sphinx bondit à travers les ruines, disparaît derrière le mur et réapparaît.)
ŒDIPE (finit de compter).
47, 48, 49
(attend un peu et crie)
50
(Il se retourne)
Vous !
LE SPHINX (d'une voix lointaine, haute, joyeuse, terrible).
Moi ! Moi ! Le Sphinx !
ŒDIPE.
Je rêve !
Jean Cocteau
La Machine infernale, Acte II, Paris, éd. Grasset
1934
Les répliques
L'essentiel du texte théâtral est composé des répliques prononcées par les comédiens. Il peut s'agir d'un monologue, quand un comédien est seul sur scène, ou d'un dialogue quand deux ou plus de deux comédiens s'échangent des répliques.
On appelle aparté une réplique qu'un comédien dit sur scène de sorte que les autres personnages ne l'entendent pas. Ce procédé est très utilisé dans la farce et la comédie.
La composition d'une pièce de théâtre
Une pièce de théâtre est généralement constituée de plusieurs actes, découpés eux-mêmes en plusieurs scènes selon les entrées et les sorties de personnages. Il arrive que la pièce soit coupée par un entracte : repos dans l'intrigue qui permet de faire une pause.
La tragédie
Définition
Tragédie
Une tragédie est une pièce de théâtre qui traite du déchaînement des passions humaines et ses conséquences néfastes. La tragédie fait naître la pitié du public.
Bérénice de Racine est une tragédie.
Les procédés du tragique
La tragédie repose sur :
- La fatalité : une force supérieure qui écrase le héros.
- La conscience que le héros a de cette fatalité
- Les champs lexicaux de la mort, de la souffrance, de la violence
- Les registres lyrique, pathétique, tragique et épique
BÉRÉNICE :
Ah ! cruel ! est-il temps de me le déclarer ?
Qu'avez-vous fait ? Hélas ! je me suis crue aimée.
Au plaisir de vous voir mon âme accoutumée
Ne vit plus que pour vous. Ignoriez-vous vos lois
Quand je vous l'avouai pour la première fois ?
À quel excès d'amour m'avez-vous amenée ?
Que ne me disiez-vous : "Princesse infortunée,
Où vas-tu t'engager, et quel est ton espoir ?
Ne donne point un cœur qu'on ne peut recevoir."
Ne l'avez-vous reçu, cruel, que pour le rendre,
Quand de vos seules mains ce cœur voudrait dépendre ?
Jean Racine
Bérénice, Acte IV, scène 5, Paris, éd. Claude Barbin (1671)
Création : 1670
La comédie
Définition
Comédie
Une comédie est une pièce de théâtre qui se moque des travers humains et cherche à amuser le spectateur. C'est Molière qui a donné ses lettres de noblesse au genre.
Dans Dom Juan, Molière se moque des hypocrites.
Souvent, la comédie a pour but de dénoncer une société, de critiquer une politique.
Aristophane critique l'inégalité entre les hommes et les femmes dans Lysistrata.
Les procédés comiques
Il existe plusieurs procédés comiques.
Comique de situation
Le comique de situation vise à faire rire le spectateur par la position embarrassante dans laquelle se trouve un personnage.
Comique de caractère
Le comique de caractère vise à faire rire le spectateur par le trait de personnalité ridicule d'un personnage dont les défauts sont exagérés.
Comique de gestes
Le comique de gestes vise à faire rire le spectateur par la gestuelle employée par un personnage.
Comique de mots
Le comique de mots vise à faire rire le spectateur par les jeux de mots ou le dialecte des personnages.
La tragi-comédie
Tragi-comédie
La tragi-comédie est une pièce de théâtre dont l'intrigue présente un caractère tragique et semble se diriger vers une issue fatale, mais dont le dénouement est finalement heureux.
Le Cid de Pierre Corneille est une tragi-comédie.
La tragi-comédie se reconnaît à :
- Sa liberté envers les règles des trois unités
- La multiplication d'événements romanesques
- Ses coups de théâtre
CHIMÈNE.
Cruel ! à quel propos sur ce point t'obstiner ?
Tu t'es vengé sans aide, et tu m'en veux donner !
Je suivrai ton exemple, et j'ai trop de courage
Pour souffrir qu'avec toi ma gloire se partage.
Mon père et mon honneur ne veulent rien devoir
Aux traits de ton amour ni de ton désespoir.
DON RODRIGUE.
Rigoureux point d'honneur ! hélas ! quoi que je fasse,
Ne pourrai-je à la fin obtenir cette grâce ?
Au nom d'un père mort, ou de notre amitié,
Punis-moi par vengeance, ou du moins par pitié.
Ton malheureux amant aura bien moins de peine
À mourir par ta main qu'à vivre avec ta haine.
CHIMÈNE.
Va, je ne te hais point.
DON RODRIGUE.
Tu le dois.
CHIMÈNE.
Je ne puis.
Pierre Corneille
Le Cid, Acte III, scène 4, Paris, éd. F. Targa
1637
Le drame
Drame
Le drame est un genre qui mêle comique et tragique. Il repose sur le registre pathétique. Les auteurs romantiques rejettent les règles classiques.
Lorenzaccio d'Alfred de Musset est un drame.
Le drame s'appuie sur une intrigue pathétique et donc sur :
- Une situation douloureuse
- Les champs lexicaux de la tristesse, de la douleur et de la souffrance
- L'exagération des discours
- Une ponctuation expressive
LORENZO.
Tu me demandes pourquoi je tue Alexandre ? Veux-tu donc que je m'empoisonne, ou que je saute dans l'Arno ? veux-tu donc que je sois un spectre, et qu'en frappant sur ce squelette (Il frappe sa poitrine), il n'en sorte aucun son ? Si je suis l'ombre de moi-même, veux-tu donc que je m'arrache le seul fil qui rattache aujourd'hui mon cœur à quelques fibres de mon cœur d'autrefois ? Songes-tu que ce meurtre, c'est tout ce qui me reste de ma vertu ? Songes-tu que je glisse depuis deux ans sur un mur taillé à pic, et que ce meurtre est le seul brin d'herbe où j'aie pu cramponner mes ongles ? Crois-tu donc que je n'aie plus d'orgueil, parce que je n'ai plus de honte ? et veux-tu que je laisse mourir en silence l'énigme de ma vie ? Oui, cela est certain, si je pouvais revenir à la vertu, si mon apprentissage du vice pouvait s'évanouir, j'épargnerais peut-être ce conducteur de bœufs.
Alfred de Musset
Lorenzaccio, Acte III, scène 3, Œuvres complètes d'Alfred de Musset, tome IV, Paris, éd. Charpentier, 1888
Création : 1834
Le roman
Définition
Roman
Le roman est un long récit en prose.
Jane Eyre de Charlotte Brontë et Les Malheurs de Sophie de la Comtesse de Ségur sont des romans.
Le roman réaliste
Roman réaliste
Le roman réaliste a pour but de décrire le monde tel qu'il est.
Les grands romanciers représentant ce genre sont Honoré de Balzac, Gustave Flaubert, Stendhal, Guy de Maupassant.
Eugénie Grandet d'Honoré de Balzac est un roman réaliste.
Faire vrai consiste donc à donner l'illusion complète du vrai, suivant la logique ordinaire des faits, et non à les transcrire servilement dans le pêle-mêle de leur succession. J'en conclus donc que les réalistes de talent devraient s'appeler plutôt des illusionnistes.
Guy de Maupassant
Préface de Pierre et Jean, Paris, éd. Paul Ollendorf
1888
Les caractéristiques du roman réaliste sont :
- L'écrivain témoigne sur son époque.
- La description a beaucoup d'importance.
- Le vocabulaire employé est précis et spécialisé.
- L'écriture vise à l'impersonnalité.
- Absence d'idéalisation, regard qui tend à l'objectivité.
C'est Balzac qui donne ses lettres de noblesse au roman réaliste. Il conçoit le roman comme une histoire des mœurs. Les auteurs réalistes peignent la réalité matérielle et psychologique de la vie quotidienne. Il s'agit de donner l'illusion de la vie.
Aussi la mort de cet homme ne contrasta-t-elle point avec sa vie. Dès le matin, il se faisait rouler entre la cheminée de sa chambre et la porte de son cabinet, sans doute plein d'or. Il restait là sans mouvement, mais il regardait tour à tour avec son anxiété ceux qui venaient le voir et la porte doublée de fer. Il se faisait rendre compte des moindres bruits qu'il entendait ; et au grand étonnement du notaire, il entendait le bâillement de son chien dans la cour. Il se réveillait de sa stupeur apparente au jour et à l'heure où il fallait recevoir des fermages, faire des comptes avec les closiers, ou donner des quittances. Il agitait alors son fauteuil à roulettes jusqu'à ce qu'il se trouvât en face de la porte de son cabinet. Il le faisait ouvrir par sa fille, et veillait à ce qu'elle plaçât en secret elle-même les sacs d'argent les uns sur les autres, à ce qu'elle fermât la porte. Puis il revenait à sa place silencieusement aussitôt qu'elle lui avait rendu la précieuse clef, toujours placée dans la poche de son gilet, et qu'il tâtait de temps en temps…
Honoré de Balzac
Eugénie Grandet, Paris, éd. Madame Béchet
1834
Le roman naturaliste
Roman naturaliste
Le roman naturaliste a pour but de peindre la réalité en s'appuyant sur une documentation riche et en appliquant la méthode expérimentale.
Le grand romancier naturaliste est Émile Zola.
L'Assommoir, Au Bonheur des Dames et Germinal, respectivement écrits en 1876, 1886 et 1885, sont des romans naturalistes d'Émile Zola.
Les caractéristiques du roman naturaliste sont :
- La description a beaucoup d'importance.
- Le vocabulaire est très technique.
- La focalisation externe est souvent utilisée.
- Le discours indirect libre est souvent utilisé.
- L'auteur peut utiliser le lyrisme.
Le roman naturaliste est dans la continuité du roman réaliste. Flaubert prépare minutieusement ses romans en menant une enquête sociologique. Il souligne la manière dont les personnages sont influencés par les milieux et les circonstances de leur vie. Il prépare le naturalisme qui cherche surtout à imiter le réel. Mais il est aussi caractérisé par son lyrisme, ce qu'on ne trouve pas dans le roman réaliste.
Mais il dut attendre, un des garçons qui découpaient venait de s'entailler le doigt, et cela jetait un trouble. Il restait la face à l'ouverture, regardant la cuisine, d'une installation géante, avec son fourneau central, sur lequel deux rails fixés au plafond amenaient par un système de poulies et de chaînes, les colossales marmites que quatre hommes n'auraient pu soulever. Des cuisiniers, tout blancs dans le rouge sombre de la fonte, surveillaient le pot-au-feu du soir, montés sur des échelles de fer, armés d'écumoires, au bout de grands bâtons. Puis, c'étaient, contre le mur, des grils à faire griller des martyrs, des casseroles à fricasser un mouton, un chauffe-assiettes monumental, une vasque de marbre emplie par un continuel filet d'eau. Et l'on apercevait encore, à gauche, une laverie, des éviers de pierre larges comme des piscines ; tandis que, de l'autre côté, à droite, se trouvait un garde-manger, où l'on entrevoyait des viandes rouges, à des crocs d'acier. Une machine à pelurer les pommes de terre fonctionnait avec un tic-tac de moulin. Deux petites voitures, pleines de salades épluchées, passaient, traînées par des aides, qui allaient les remiser au frais, sous une fontaine.
Émile Zola
Au Bonheur des Dames, Paris, éd. Charpentier
1883
Le roman d'anticipation ou de science-fiction
Roman d'anticipation
Le roman d'anticipation est un récit dont l'intrigue se situe dans un futur où les changements liés à l'évolution technologiques sont importants.
Le Docteur Lerne, sous-dieu de Maurice Renard est un roman d'anticipation.
Le premier dimanche de juin finissait. L'ombre de l'automobile courait devant moi, plus longue à chaque moment. Depuis le matin, les gens, faces anxieuses, me regardaient passer comme on regarde une scène de mélodrame. Avec le casque de cuir qui me faisait un crâne chauve et mes lunettes en hublots, pareilles aux orbites d'un squelette, le corps vêtu de peau tannée, je devais leur sembler quelque phoque infernal et macabre, quelque démon de saint Antoine, fuyant le soleil et volant à la rencontre de la nuit afin d'y rentrer plus tôt. Et, tout de bon, j'avais presque l'âme d'un réprouvé, car telle est celle d'un voyageur solitaire, demeuré sept heures durant sur une voiture de course. Son esprit tient du cauchemar ; en guise de pensée, l'obsession s'y obstine. La mienne était une petite phrase impérative : "Viens seul et préviens", qui, lutin tenace, harcelait ma solitude énervée de trépidations et de rapidité. Pourtant, cette injonction bizarre : "Viens seul et préviens", deux fois soulignée par mon oncle Lerne dans sa lettre, ne m'avait pas frappé d'abord outre mesure. Mais à présent que, m'y conformant, - tout seul et après avoir prévenu, - je roulais vers le château de Fonval, l'ordre inexplicable s'acharnait, pour ainsi dire, à m'étaler son étrangeté. Et mes yeux d'en poser partout les termes fatidiques, et mes oreilles de les faire sonner dans tous les bruits, en dépit de mes efforts pour chasser l'idée fixe.
Maurice Renard
Le Docteur Lerne, sous-dieu, Paris, éd. Mercure de France
1908
Roman de science-fiction
Le roman de science-fiction est un genre littéraire qui raconte des événements futurs ancrés dans le réel mais où des avancées technologiques importantes ont changé la façon de vivre des hommes.
L'Île mystérieuse de Jules Verne est un roman de science-fiction.
Quelques instants après, les trois chasseurs se trouvaient devant un foyer pétillant. Cyrus Smith et le reporter étaient là. Pencroff les regardait l'un et l'autre, sans mot dire, son cabiai à la main.
— Eh bien, oui ! s'écria le reporter. Du feu, du vrai feu, qui rôtira parfaitement ce magnifique gibier !
— Mais qui a allumé ?... demanda Pencroff.
— Le soleil !
Le marin ne voulait pas en croire ses yeux, et il était tellement ébahi, qu'il ne pensait pas à interroger l'ingénieur.
— Vous aviez donc une lentille, monsieur ? demanda Harbert à Cyrus Smith.
— Non, répondit celui-ci, mais j'en ai fait une.
Et il montra l'appareil qui lui avait servi de lentille. C'étaient tout simplement les deux verres qu'il avait enlevés à la montre de reporter et à la sienne. Après les avoir remplis d'eau et rendu leurs bords adhérents au moyen d'un peu de glaise, il s'était ainsi fabriqué une véritable lentille, qui, concentrant les rayons solaires sur une mousse bien sèche, en avait déterminé la combustion.
Jules Verne
L'Île mystérieuse, Paris, éd. Pierre-Jules Hetzel
1875
Le roman contemporain
Le roman à portée philosophique
Roman à portée philosophique
Le roman à portée philosophique fait réfléchir par le biais de la fiction. Au XXe siècle, George Orwell s'est particulièrement illustré dans ce genre en signant des romans d'anticipation ou des romans-fables.
Avec Le Petit Prince, Saint-Exupéry signe un conte philosophique.
Et il revint vers le renard :
— Adieu, dit-il...
— Adieu, dit le renard. Voici mon secret. Il est très simple : on ne voit bien qu'avec le cœur. L'essentiel est invisible pour les yeux.
— L'essentiel est invisible pour les yeux, répéta le petit prince, afin de se souvenir.
— C'est le temps que tu as perdu pour ta rose qui fait ta rose si importante.
— C'est le temps que j'ai perdu pour ma rose... fit le petit prince, afin de se souvenir.
— Les hommes ont oublié cette vérité, dit le renard. Mais tu ne dois pas l'oublier. Tu deviens responsable pour toujours de ce que tu as apprivoisé. Tu es responsable de ta rose...
— Je suis responsable de ma rose... répéta le petit prince, afin de se souvenir.
Antoine de Saint-Exupéry
Le Petit Prince, Paris, éd. Gallimard
1943
Le roman autobiographique ou d'autofiction
Roman autobiographique ou d'autofiction
Le roman autobiographique et l'autofiction sont des romans dans lequel l'auteur s'inspire de sa propre vie pour écrire un récit. Ils proposent le regard de l'auteur sur la société dans laquelle il évolue.
Nathalie Sarraute a raconté son enfance dans Enfance.
— Alors, tu vas vraiment faire ça ? "Évoquer tes souvenirs d'enfance"... Comme ces mots te gênent, tu ne les aimes pas. Mais reconnais que ce sont les seuls mots qui conviennent. Tu veux "évoquer tes souvenirs"... il n'y a pas à tortiller, c'est bien ça.
— Oui, je n'y peux rien, ça me tente, je ne sais pas pourquoi...
— C'est peut-être... est-ce que ce ne serait pas... on ne s'en rend parfois pas compte... c'est peut-être que tes forces déclinent...
— Non, je ne crois pas... du moins je ne le sens pas...
— Et pourtant ce que tu veux faire... "évoquer tes souvenirs"... est-ce que ce ne serait pas...
— Oh, je t'en prie...
— Si, il faut se le demander : est-ce que ce ne serait pas prendre ta retraite ? te ranger ? quitter ton élément, où jusqu'ici, tant bien que mal...
— Oui, comme tu dis, tant bien que mal.
— Peut-être, mais c'est le seul où tu aies jamais pu vivre... celui...
— Oh, à quoi bon ? je le connais.
Nathalie Sarraute
Enfance, Paris, éd. Gallimard, coll. "Blanche"
1983
Les récits autobiographiques peuvent également prendre la forme de :
- Mémoires : il s'agit d'un ouvrage dans lequel l'auteur consigne ses souvenirs et relate les événements historiques de son époque. Le général de Gaulle a écrit ses mémoires.
- Journal : il s'agit d'un document intime, qui n'est d'abord pas destiné à être publié, et dans lequel l'auteur relate sa vie. Le journal d'Anne Frank est l'un des plus célèbres.
- Correspondance : il s'agit de lettres. La correspondance de Gustave Flaubert est très connue.
La nouvelle
Généralités
Nouvelle
La nouvelle est un récit fictif en prose qui se caractérise par sa brièveté. On la rapproche parfois du conte, mais à l'inverse de ce dernier, elle peut être réaliste. Elle se distingue du roman car elle se centre sur un seul événement et les descriptions y sont souvent moins longues. Elle suggère au lieu de tout expliquer. Les personnages sont en nombre restreint.
"La Parure" est une nouvelle de Maupassant.
La nouvelle réaliste
Nouvelle réaliste
La nouvelle réaliste est un court récit qui a pour but de décrire le monde tel qu'il est.
"L'Enfant" de Guy de Maupassant est une nouvelle réaliste.
Alors il se rangea, sans consentir même à revoir une seule fois celle avec qui il avait vécu longtemps. Un ami régla la pension de cette femme, assura son existence. Jacques paya, mais ne voulut pas entendre parler d'elle, prétendant désormais ignorer jusqu'à son nom. Elle écrivit des lettres sans qu'il les ouvrît. Chaque semaine, il reconnaissait l'écriture maladroite de l'abandonnée ; et, chaque semaine, une colère plus grande lui venait contre elle, et il déchirait brusquement l'enveloppe et le papier, sans ouvrir, sans lire une ligne, une seule ligne, sachant d'avance les reproches et les plaintes contenues là-dedans.
Comme on ne croyait guère à sa persévérance, on fit durer l'épreuve tout l'hiver, et c'est seulement au printemps que sa demande fut agréée.
Le mariage eut lieu à Paris, dans les premiers jours de mai.
Guy de Maupassant
"L'Enfant", Paris, éd. Monnier
1883
La nouvelle naturaliste
Nouvelle naturaliste
La nouvelle naturaliste est un court récit qui a pour but de peindre la réalité en s'appuyant sur une documentation riche et en appliquant la méthode expérimentale.
"La Retraite de Monsieur Bougran" de Joris-Karl Huysmans est une nouvelle naturaliste.
M.Bougran n'écoutait plus. D'un œil de bête assommée il scrutait ce cabinet de chef de bureau où il pénétrait d'habitude sur la pointe des pieds, comme dans une chapelle, avec respect. Cette pièce sèche et froide, mais familière, lui semblait devenue soudain maussade et bouffie, hostile, avec son papier d'un vert mat à raies veloutées, ses bibliothèques vitrées peintes en chêne et pleines de bulletins des lois, de "recueils des actes administratifs," conservés dans ces reliures spéciales aux Ministères, des reliures en veau jaspé, avec plats en papier couleur bois et tranches jaunes, sa cheminée ornée d'une pendule-borne, de deux flambeaux Empire, son canapé de crin, son tapis à roses en formes de choux, sa table en acajou encombrée de paperasses et de livres et sur laquelle posait un macaron hérissé d'amandes pour sonner les gens, ses fauteuils aux ressorts chagrins, son siège de bureau à la canne creusée aux bras, par l'usage, en demi-lune.
Joris-Karl Huysmans
"La Retraite de Monsieur Bougran", Paris, éd. Jean-Jacques Pauvert
1964 (publication posthume)
La nouvelle fantastique
Nouvelle fantastique
La nouvelle fantastique est un court récit caractérisé par l'irruption du surnaturel dans un cadre réaliste.
" La Vénus d'Ille" de Prosper Mérimée est une nouvelle fantastique.
La chevelure, relevée sur le front, paraissait avoir été dorée autrefois. La tête, petite comme celle de presque toutes les statues grecques, était légèrement inclinée en avant. Quant à la figure, jamais je ne parviendrai à exprimer son caractère étrange, et dont le type ne se rapprochait de celui d'aucune statue antique dont il me souvienne. Ce n'était point cette beauté calme et sévère des sculpteurs grecs, qui, par système, donnaient à tous les traits une majestueuse immobilité. Ici, au contraire, j'observais avec surprise l'intention marquée de l'artiste de rendre la malice arrivant jusqu'à la méchanceté. Tous les traits étaient contractés légèrement : les yeux un peu obliques, la bouche relevée des coins, les narines quelque peu gonflées. Dédain, ironie, cruauté, se lisaient sur ce visage d'une incroyable beauté cependant. En vérité, plus on regardait cette admirable statue, et plus on éprouvait le sentiment pénible qu'une si merveilleuse beauté pût s'allier à l'absence de toute sensibilité.
Prosper Mérimée
"La Vénus d'Ille", Colomba et autres contes et nouvelles, Paris, éd. Charpentier (1845)
1837
La poésie
Définition
Poésie
La poésie est un genre littéraire regroupant les textes littéraires qui reposent sur un travail du rythme, de l'harmonie et des sons. La poésie s'écrit surtout en vers. Elle peut également s'écrire en prose.
Un homme épouvantable entre et se regarde dans la glace.
"Pourquoi vous regardez-vous au miroir, puisque vous ne pouvez vous y voir qu'avec déplaisir ?" L'homme épouvantable me répond : "Monsieur, d'après les immortels principes de 89, tous les hommes sont égaux en droits ; donc je possède le droit de me mirer; avec plaisir ou déplaisir, cela ne regarde que ma conscience."
Au nom du bon sens, j'avais sans doute raison ; mais, au point de vue de la loi, il n'avait pas tort.
Charles Baudelaire
"Le Miroir", Œuvres complètes, Paris, éd. Michel Lévy (1869)
1864
Le poème ci-dessus est écrit en prose.
La poésie lyrique
Poésie lyrique
La poésie lyrique permet l'exaltation des sentiments personnels.
Alphonse de Lamartine est un grand poète romantique du XIXe siècle qui a composé plusieurs poèmes lyriques.
Pourquoi mon cœur bat-il si vite ?
Qu'ai-je donc en moi qui s'agite
Dont je me sens épouvanté ?
Ne frappe-t-on pas à ma porte ?
Pourquoi ma lampe à demi morte
M'éblouit-elle de clarté ?
Dieu puissant ! tout mon corps frissonne.
Qui vient ? qui m'appelle ? - Personne.
Je suis seul ; c'est l'heure qui sonne ;
Ô solitude ! ô pauvreté !
Alfred de Musset
"La Nuit de mai", Poésies nouvelles (1836-1852), Paris, éd. Charpentier (1857)
1835
Le poème ci-dessus est lyrique.
La poésie satirique
Poésie satirique
La poésie satirique est une poésie légère visant à tourner quelque chose en dérision.
Qui frappe l'air, bon Dieu ! de ces lugubres cris ?
Est-ce donc pour veiller qu'on se couche à Paris ?
Et quel fâcheux démon, durant les nuits entières,
Rassemble ici les chats de toutes les gouttières ?
J'ai beau sauter du lit, plein de trouble et d'effroi,
Je pense qu'avec eux tout l'enfer est chez moi :
L'un miaule en grondant comme un tigre en furie ;
L'autre roule sa voix comme un enfant qui crie.
Ce n'est pas tout encor : les souris et les rats
Semblent, pour m'éveiller, s'entendre avec les chats,
Plus importuns pour moi, durant la nuit obscure,
Que jamais, en plein jour, ne fut l'abbé de Pure.
Nicolas Boileau
"Les Embarras de Paris", Satires, Paris, Imprimerie générale (1872)
1666
La poésie épique
Poésie épique
La poésie épique est une poésie exaltant des actions héroïques.
Ô Chutes d'Annibal ! Lendemains d'Attila !
Fuyards, blessés, mourants, caissons, brancards, civières,
On s'écrasait aux ponts pour passer les rivières.
On s'endormait dix mille, on se réveillait cent.
Ney, que suivait naguère une armée, à présent
S'évadait, disputant sa montre à trois cosaques.
Toutes les nuits, qui vive ! alerte, assauts ! attaques !
Ces fantômes prenaient leur fusil, et sur eux
Ils voyaient se ruer, effrayants, ténébreux,
Avec des cris pareils aux voix des vautours chauves,
D'horribles escadrons, tourbillons d'hommes fauves.
Toute une armée ainsi dans la nuit se perdait.
L'empereur était là, debout, qui regardait.
Victor Hugo
"L'autorité est sacrée", Les Châtiments, Livre V, Paris, éd. Henri Samuel et Cie
1852
La poésie didactique
Poésie didactique
La poésie didactique est une poésie cherchant à enseigner quelque chose au lecteur.
Amusez les Rois par des songes,
Flattez-les, payez-les d'agréables mensonges,
Quelque indignation dont leur cœur soit rempli,
Ils goberont l'appât, vous serez leur ami.
Jean de La Fontaine
"Les Obsèques de la lionne", Fables, Paris, éd. Barbin et Thierry
1668-1694
L'essai
Essai
L'essai est un texte à visée argumentative traitant souvent d'un sujet moral ou philosophique.
Le nom est donné d'après la célèbre œuvre de Montaigne, Essais, qu'il a rédigé jusqu'à sa mort.
C'est ici un livre de bonne foi, lecteur. Il t'avertit, dés l'entrée, que je ne m'y suis proposé aucune fin, que domestique et privée. Je n'y ai eu nulle considération de ton service, ni de ma gloire. Mes forces ne sont pas capables d'un tel dessein. Je l'ai voué à la commodité particulière de mes parents et amis : à ce que m'ayant perdu (ce qu'ils ont à faire bientôt) ils y puissent retrouver aucuns traits de mes conditions et humeurs, et que par ce moyen ils nourrissent, plus altière et plus vive, la connaissance qu'ils ont eue de moi. Si c'eût été pour rechercher la faveur du monde, je me fusse mieux paré et me présenterais en une marche étudiée. Je veux qu'on m'y voie en ma façon simple, naturelle et ordinaire, sans contention et artifice : car c'est moi que je peins. Mes défauts s'y liront au vif, et ma forme naïve, autant que la révérence publique me l'a permis. Que si j'eusse été entre ces nations qu'on dit vivre encore sous la douce liberté des premières lois de nature, je t'assure que je m'y fusse très volontiers peint tout entier, et tout nu. Ainsi, lecteur, je suis moi-même la matière de mon livre : ce n'est pas raison que tu emploies ton loisir en un sujet si frivole et si vain. Adieu donc ; de Montaigne, ce premier de mars mil cinq cent quatre vingts.
Michel de Montaigne
Essais, Bordeaux, éd. Simon Millanges
1580
Le pamphlet
Pamphlet
Le pamphlet est un court texte polémique traitant d'un sujet d'actualité.
"J'accuse...!" d'Émile Zola est un pamphlet.
J'accuse le général Mercier de s'être rendu complice, tout au moins par faiblesse d'esprit, d'une des plus grandes iniquités du siècle.
J'accuse le général Billot d'avoir eu entre les mains les preuves certaines de l'innocence de Dreyfus et de les avoir étouffées, de s'être rendu coupable de ce crime de lèse-humanité et de lèse-justice, dans un but politique et pour sauver l'état-major compromis.
J'accuse le général de Boisdeffre et le général Gonse de s'être rendus complices du même crime, l'un sans doute par passion cléricale, l'autre peut-être par cet esprit de corps qui fait des bureaux de la guerre l'arche sainte, inattaquable.
Émile Zola
"J'accuse...!", L'Aurore
13 janvier 1898
Le genre journalistique
Il existe différents genres journalistiques.
Caricature
La caricature est une représentation graphique humoristique d'un événement d'actualité.
Critique
La critique est un article d'opinion en général sur un événement culturel.
Article d'opinion
L'article d'opinion et d'analyse est un texte qui défend ou condamne une idée / un événement en s'appuyant sur une recherche poussée.
Brève
La brève est un texte court qui relate en quelques lignes une information.