Chacune des phrases suivantes consiste-t-elle en un discours ou en un récit ?
J'ai tort, j'ai tort, disait-elle. Je suis folle de vous entendre.
(Gustave Flaubert, Madame Bovary)
Je courus vers la mer, m'y enfonçai en gémissant sur les vacances que nous aurions pu avoir, que nous n'aurions pas. Nous avions tous les éléments d'un drame : un séducteur, une demi-mondaine et une femme de tête. J'aperçus au fond de la mer un ravissant coquillage, une pierre rose et bleu ; je plongeai pour la prendre, la gardai toute douce et usée dans la main jusqu'au déjeuner. Je décidai que c'était un porte-bonheur, que je ne la quitterais pas de l'été. Je ne sais pas pourquoi je ne l'ai pas perdue, comme je perds tout. Elle est dans ma main aujourd'hui, rose et tiède, elle me donne envie de pleurer.
(Françoise Sagan, Bonjour tristesse)
Vous pourrez aider à danser les gens qui dansent. Vous pourrez accompagner les acteurs qui chantent sur la scène. Vous gagnerez votre vie. Vous vivrez entouré de musique mais vous ne serez pas musicien.
Avez-vous un cœur pour sentir ? Avez-vous un cerveau pour penser ? Avez-vous idée de ce à quoi peuvent servir les sons quand il ne s'agit plus de danser ni de réjouir les oreilles du roi ?
Cependant votre voix brisée m'a ému. Je vous garde pour votre douleur, non pour votre art.
(Pascal Quignard, Tous les matins du monde)
Écrivez ce que vous désirez écrire, c'est tout ce qui importe, et nul ne peut prévoir si cela importera pendant des siècles ou pendant des jours. Mais sacrifier un cheveu de la tête de votre vision, une nuance de sa couleur, par déférence envers quelque maître d'école tenant une coupe d'argent à la main ou envers quelque professeur armé d'un mètre, c'est commettre la plus abjecte des trahisons.
(Virginia Woolf, Une chambre à soi)