Sommaire
ILes débutsAEnfance et jeunesseBPremiers écritsCFlaubert, un pessimisteIIUne vie sentimentale tourmentéeIIIL'œuvre littéraireAMadame Bovary : une œuvre novatriceBL'exotisme de SalammbôCUn roman historique : L'Éducation sentimentale DUne œuvre inachevée, Bouvard et PécuchetIVLa fin de sa vieFlaubert est né en 1821 et mort en 1880. Il a grandi dans une famille bourgeoise marquée par un certain détachement par rapport à Dieu. Enfant brillant, Flaubert s'intéresse très tôt à la littérature. Il développe rapidement un certain talent pour l'écriture, et commence très jeune à écrire divers genres de textes, dont il fait parfois cadeau aux membres de son entourage.
Pessimiste, Flaubert sombre dans un certain dégoût de l'être humain et une profonde mélancolie après la mort de sa sœur. Il s'isole à la campagne et passe toute sa vie à écrire. Il ne se mariera jamais et ne connaîtra qu'une relation amoureuse sérieuse avec l'écrivaine et mondaine Louise Colet. Ses grandes œuvres sont Madame Bovary, Salammbô, L'Éducation sentimentale et Bouvard et Pécuchet, qu'il n'a pas terminé.
Les débuts
Enfance et jeunesse
Gustave Flaubert est né le 12 décembre 1821 à Rouen, en Seine-Maritime, dans le nord de la France. Il est le deuxième fils d'Achille-Cléophas Flaubert, un chirurgien, et d'Anne-Justine-Caroline Fleuriot. Son père vient d'une famille bourgeoise. Il fait de brillantes études de médecine. Flaubert semble s'être inspiré de lui pour son personnage du docteur Larivière dans Madame Bovary, qu'il présente sous un jour positif.
Il appartenait à la grande école chirurgicale sortie du tablier de Bichat, à cette génération, maintenant disparue, de praticiens philosophes qui, chérissant leur art d'un amour fanatique, l'exerçaient avec exaltation et sagacité.
Gustave Flaubert
Madame Bovary
1856
Il est instruit d'abord par sa mère, ce qui est courant dans les familles bourgeoises. D'elle, il écrit qu'elle est une "brave femme, de sens droit et d'esprit large". Il est très proche de sa sœur Caroline, à qui il ne cesse de donner des petits noms dans ses lettres : "mon bon rat", "biquet" ou encore "bichet". Il est d'ailleurs très attristé par son départ de la maison en 1845, suite à son mariage.
Flaubert est initié à la littérature par sa bonne, Julie, qui lui racontait de nombreuses histoires, mais aussi par le père Mignot, le grand-père d'un ami.
Il est important de noter que Flaubert ne reçoit pas une éducation religieuse poussée. Il est baptisé, car cela se fait à son époque, mais ses parents ne semblent pas se préoccuper plus que cela de Dieu. Sa mère devient d'ailleurs athée après la mort de son mari et de sa fille. Des écrits qu'il compose durant son adolescence tendent à montrer que Flaubert n'est pas croyant.
J'ai cherché et je n'ai rien trouvé.
Gustave Flaubert
Agonies ou Les Mémoires d'un fou
1839
Dans cette œuvre de jeunesse autobiographique, Flaubert traite de son impossible quête de Dieu.
Flaubert commence à écrire assez jeune. Selon certaines sources, il débute l'écriture à 8 ans. Il suit ses études au lycée Pierre Corneille à Rouen et y reste jusqu'en 1840, date de son départ pour Paris où il commence des études de droit.
Il n'aime pas Paris, il a du mal à se faire au bruit de la ville, au train de vie des Parisiens, à la mentalité. Il trouve la capitale sale et inhospitalière. Il y fait toutefois la connaissance de nombreux écrivains dont Victor Hugo.
Premiers écrits
Flaubert se passionne très tôt pour l'écriture. Si son premier roman, Madame Bovary, est publié quand il a 35 ans, il a toutefois déjà composé une œuvre abondante, aujourd'hui publiée aux éditions de La Pléiade.
Il écrit des textes de divers genres :
- Théâtre
- Roman historique
- Nouvelle
- Discours
Les premiers textes que l'on peut dater ont été composés alors que Flaubert a 9 ans.
Flaubert écrit un "Éloge de Corneille" alors qu'il n'a que 10 ans.
Au collège de Rouen, il crée le journal Les Soirées d'étude. Passionné d'histoire, il compose aussi plusieurs contes historiques.
Flaubert offre à sa mère une courte biographie de Louis XIII.
Flaubert crée la revue littéraire Art et Progrès dont il devient rédacteur. En 1837, il collabore au Colibri, un journal de Rouen. Il y écrit quelques nouvelles :
- "Rêve d'enfer"
- "Passion et vertu"
- "Bibliomanie"
Si, adulte, Flaubert se tourne vers le réalisme, ses œuvres de jeunesse sont marquées par le courant littéraire romantique. Il y fait preuve d'un grand lyrisme. Il y a aussi des textes fantastiques, comme le conte Quidquid volueris. Sa première production romanesque est Novembre, un roman publié en 1842, qui est autobiographique.
En 1846, après une crise d'épilepsie, Flaubert quitte Paris et abandonne ses études de droit, pour lesquelles il avait finalement peu d'intérêt.
Je me fous pas mal du Droit, pourvu que j'ai celui de fumer ma pipe et de regarder les nuages rouler au ciel, couché sur le dos en fermant à demi les yeux. C'est tout ce que je veux.
Gustave Flaubert
Lettre à Louise Colet
7 juillet 1853
Par la suite, Flaubert s'installe à Croisset, dans la grande maison que son père vient d'acheter. Il y passera la majeure partie de sa vie, à écrire.
En 1849, il termine la première version de son roman intitulé La Tentation de saint Antoine. Il a été inspiré par le tableau du même nom de Bruegel, qu'il a vu à Gênes en 1845. Il lit cet ouvrage à voix haute à Louis Bouilhet et Maxime Du Camp en quatre jours. Il ne leur donne pas l'autorisation de l'interrompre ou de donner leur opinion. Après la lecture, ses amis lui conseillent de jeter le manuscrit au feu et de se concentrer sur la vie de tous les jours plutôt que sur des sujets fantastiques.
Flaubert, un pessimiste
Si Flaubert se lance dans la littérature, ce n'est pas par hasard. Il exècre le monde. Il pose un regard désabusé sur la société qui l'entoure. Tout au long de sa vie, l'écrivain va faire savoir, notamment dans ses lettres, le dégoût qu'il a des hommes. L'écriture lui semble un autre monde, un monde idéal, exalté, absolu.
Grisons-nous avec de l'encre, puisque le nectar des dieux nous manque.
Gustave Flaubert
Correspondances de Flaubert
Le profond pessimisme de Flaubert a été moqué par certains de ses amis. En effet, c'est un garçon qui est profondément aimé par ses parents et sa sœur, qui a de nombreux amis, qui jouit d'une position sociale enviable. D'ailleurs, il passe aussi pour un "gros diseur de bêtises" auprès de ses amis. Mais à la mort de son père, et surtout de sa sœur, il s'enfonce dans une grande tristesse. Il décide alors de consacrer sa vie à l'Art, et uniquement à lui.
La vertu c'est le masque, le vice c'est la vérité […] ; la maison de l'honnête homme c'est le masque, le lupanar c'est la vérité ; la couche nuptiale c'est le masque, l'adultère qui s'y consomme c'est la vérité ; la vie c'est le masque, la mort c'est la vérité.
Gustave Flaubert
Œuvres de jeunesse
Une vie sentimentale tourmentée
Flaubert rencontre Elisa Schlésinger alors qu'il est en vacances à Trouville, durant l'été 1836. Elle est son premier et véritable amour. Cette rencontre est une source d'inspiration pour son roman L'Éducation sentimentale. En effet, Flaubert a 15 ans, Elisa dix de plus que lui, et leur amour restera platonique. Cela rappelle bien les sentiments du jeune Frédéric pour son aînée Madame Arnoux.
Elsa a d'abord été mariée à un soldat, parti pour l'Algérie, avant de rencontrer Maurice Schlésinger avec lequel elle vit maritalement. Peut-être cela a-t-il influencé Flaubert, qui se préoccupe très souvent dans ses écrits de la "femme mal mariée".
À Paris, Flaubert mène une vie très mondaine, il enchaîne les conquêtes amoureuses. Il s'intéresse peu à ses études, et préfère s'amuser. Il détaille, notamment dans Mémoires d'un fou, ses aventures érotiques avec plusieurs jeunes femmes. Mais ses problèmes de santé importants, et la mort en couche de sa sœur Caroline, le poussent à retourner vivre à Croisset. Il y vivra avec sa mère pour le restant de sa vie, même s'il fait des visites régulières à Paris et en Angleterre, où il a des maîtresses.
Flaubert ne s'est jamais marié. Sa relation avec Louise Colet est sa seule et unique histoire d'amour sérieuse. Elle est également sa correspondante et sa confidente jusqu'en 1854. Elle a dix ans de plus que lui, c'est une femme considérée très belle par ses contemporains, qui est également écrivain. Elle a notamment traduit La Tempête de Shakespeare, et publié plusieurs poèmes et nouvelles, dont le recueil Les Cœurs brisés.
À la fin de sa liaison avec Louise Colet, Flaubert perd tout intérêt pour les relations romantiques et recherche uniquement des amitiés platoniques, particulièrement avec d'autres écrivains. Avec son ami de toujours, Maxime Du Camp, il voyage en France, mais aussi en Orient pendant dix-huit mois, se documentant pour son nouveau roman Salammbô.
L'œuvre littéraire
Madame Bovary : une œuvre novatrice
Flaubert se lance dans la rédaction de Madame Bovary en juin 1851. Il va passer une grande partie de sa vie à rédiger ce roman. La version finale de l'œuvre est terminée le 30 juin 1856.
Le texte paraît à partir du 1er octobre 1856 dans la Revue de Paris. Le scandale éclate alors, et Flaubert est cité à comparaître en procès avec son éditeur en 1857. Après l'acquittement, Michel Lévy publie le roman qui connaît un très grand succès. Le procès a en effet été très médiatisé, et tout le monde veut lire ce roman. Le livre n'est pas forcément apprécié par la critique, seuls quelques auteurs contemporains remarquent la révolution esthétique du chef-d'œuvre de Flaubert.
Flaubert a de grandes ambitions pour cet ouvrage qu'il voudrait être un "livre sur rien". Le roman est resté dans l'histoire littéraire comme un ouvrage novateur et scandaleux, qui redéfinit le genre romanesque.
Ce qui me semble beau, ce que je voudrais faire, c'est un livre sur rien, un livre sans attache extérieure, qui se tiendrait lui-même par la force interne de son style, comme la Terre sans être soutenue se tient en l'air, un livre qui n'aurait presque pas de sujet ou du moins où le sujet serait presque invisible, si cela se peut.
Gustave Flaubert
Lettre à Louise Colet
16 janvier 1852
L'exotisme de Salammbô
D'avril à juin 1858, Flaubert part pour Carthage. Il est alors en pleine rédaction de Salammbô, roman historique qui se situe en Orient. L'orientalisme est alors très à la mode en littérature, et de nombreux auteurs s'en inspirent.
Victor Hugo s'inspire de l'orientalisme avec son recueil de poèmes Les Orientales.
Le roman paraît en 1862. Il traite de la Guerre des Mercenaires qui opposa la ville de Carthage aux Mercenaires barbares qu'elle avait employés pendant la première guerre punique. Ils se révoltèrent, car ils n'avaient pas reçu la somme d'argent convenue.
Flaubert met en scène un Orient sensuel, mais aussi violent et sanglant. Si le sujet intéresse l'écrivain, c'est aussi car il avoue avoir besoin de sortir du monde moderne. On trouve d'ailleurs dans ce roman plusieurs marques de lyrisme, notamment dans les descriptions sensuelles des paysages, comme si Flaubert s'était éloigné un moment de son "projet littéraire".
Je vais écrire un roman dont l'action se passera trois siècles avant Jésus-Christ, car j'éprouve le besoin de sortir du monde moderne où ma plume s'est trop trempée et qui d'ailleurs me fatigue autant à reproduire qu'il me dégoûte à voir.
Gustave Flaubert
Lettre à Mlle Leroyer de Chantepie
18 mars 1857
Un roman historique : L'Éducation sentimentale
Flaubert travaille ensuite à deux autres plans de romans, Bouvard et Pécuchet et L'Éducation sentimentale. Il choisit de commencer par rédiger le second en 1864. L'écriture du roman s'étale sur cinq ans. Flaubert s'inspire de son amour platonique pour Elisa en mettant en scène l'histoire entre le jeune Frédéric et Madame Arnoux.
Il s'agit d'un roman historique, très documenté, où Flaubert mêle grande Histoire et petite histoire personnelle. Frédéric connaît successivement la monarchie de Juillet, la seconde République et l'avènement du Second Empire.
Le roman s'intéresse à l'éducation de ce jeune homme naïf et inactif qui regarde la vie passer devant lui. Il est publié en 1869, mais ne rencontre pas le succès escompté. Toutefois, il est aujourd'hui considéré comme un grand roman psychologique et initiatique.
Une œuvre inachevée, Bouvard et Pécuchet
Les événements politiques en France (la guerre de 1870 et la Commune) et plusieurs deuils empêchent ensuite Flaubert de se consacrer pleinement à une nouvelle œuvre. C'est en 1872 qu'il s'attaque à une relecture de ce qu'il avait écrit pour Bouvard et Pécuchet, dont il commence véritablement la rédaction en 1874. Mais il connaît des problèmes financiers et des soucis de santé. Il rédige alors trois contes, genre qui lui demande moins d'effort que le roman. Ces trois histoires s'intitulent :
- "La Légende de Saint Julien l'Hospitalier"
- "Un cœur simple"
- "Hérodias"
Lorsqu'il reprend Bouvard et Pécuchet, Flaubert est toujours souffrant. Il meurt brutalement le 8 mai 1880 sans avoir terminé son dernier roman.
L'histoire est celle de l'amitié de deux hommes, Bouvard et Pécuchet, qui croient pouvoir entreprendre n'importe quoi, et finissent par ne rien faire du tout. L'ironie mordante de Flaubert dénonce la pensée intellectuelle de son époque. Il reproche aux hommes de vouloir tout savoir, mais de ne rien savoir de façon approfondie et véritable.
La fin de sa vie
Flaubert meurt d'une hémorragie cérébrale le 8 mai 1880. Il a 58 ans. Ses dernières années ont été difficiles : sa mère meurt en 1872, sa maison a été occupée par des soldats prussiens au début des années 1880, il a des difficultés financières, etc. Il meurt épuisé.
Son œuvre a profondément marqué son époque et la littérature française. Il reste un des auteurs les plus respectés et étudiés encore aujourd'hui. Il a réussi à devenir ce qu'il se sentait être : "un homme-plume".
Je suis un homme-plume. Je sens par elle, à cause d'elle, par rapport à elle et beaucoup plus avec elle.
Gustave Flaubert
Lettre à Louise Colet
1863