On donne un texte extrait de Dialogues avec un sauvage de La Hontan (Texte A) et un texte extrait de l'essai L'Amitié de Jean-Pierre Vernant (Texte B).
Texte A
Ma foi, mon cher frère, je te plains dans l'âme. Crois-moi, fais-toi Huron. Car je vois la différence de ma condition à la tienne. Je suis maître de mon corps, je dispose de moi-même, je fais ce que je veux, je suis le premier et le dernier de ma nation, je ne crains personne et ne dépends uniquement que du grand Esprit, au lieu que ton corps et ta vie dépendent de ton grand capitaine ; son vice-roi dispose de toi, tu ne fais pas ce que tu veux, tu crains voleurs, faux témoins, assassins, etc. Tu dépends de mille gens que les emplois ont mis au-dessus de toi. Est-il vrai ou non ? sont-ce des choses improbables ou invisibles ? Ha ! mon cher frère, tu vois bien que j'ai raison. Cependant, tu aimes mieux être esclave français avec ses belles lois, qui, croyant être bien sage, est assurément bien fou ! puisqu'il demeure dans l'esclavage et dans la dépendance, pendant que les animaux eux-mêmes, jouissant de cette adorable liberté, ne craignent, comme nous, que des ennemis étrangers.
Texte B
Le sentiment de communauté qui est au cœur de l'amitié se retrouve également dans le lien familial. Pour un Grec, il y a dans l'amitié civique quelque chose d'assez semblable à la famille. Les membres d'une même famille se disputent, se font les pires coups, mais ils sont unis en même temps par une sorte de solidarité fondamentale. J'ai souvent dit que, dans la Résistance aussi, il y avait quelque chose de ce type. Quand je rencontre quelqu'un que je ne connais pas et dont je sais qu'il a été un résistant actif, même si c'est un adversaire politique, j'éprouve un sentiment d'appartenance analogue à celui que je peux avoir en retrouvant un arrière-cousin : "Il est des nôtres...". Dans une famille, les histoires qui circulent, les traditions qu'on a entendu raconter, les souvenirs d'enfance forment une espèce d'horizon commun que l'on partage. Quand quelqu'un s'y inscrit, cela ne signifie pas que ce soit un ami ou un copain, ni qu'on ait envie de se précipiter dans ses bras, mais on l'embrasse quand même sur les deux joues, ce qui est une façon de le reconnaître comme proche. Les racines communes, les liens familiaux viennent tout d'un coup renforcer votre identité et on se reconstruit soi-même en retrouvant des membres de la famille à laquelle on appartient. Les sentiments qu'on éprouve à l'égard de soi et à l'égard des autres sont liés à ce qu'on a ressenti autrefois. C'est, au fond, le problème du temps : on n'est plus le même, les choses se défont, et on refait son tissu personnel avec la présence de ceux qu'on n'a pas vus depuis longtemps, quand on peut évoquer avec eux toute une série de souvenirs auxquels on ne pense jamais. Le passé revient, et revient partagé. Si on y pense tout seul, on ne sait même pas s'il est vrai, mais, à partir du moment où il est intégré au folklore familial, il devient une partie de votre histoire.
Quelle est la thèse défendue par le texte A ?
Quelle est la thèse défendue par le texte B ?
Lequel de ces textes est convaincant ? Lequel est persuasif ?