Après avoir lu le texte suivant, répondre aux questions qui permettront de l'étudier.
Les Fourberies de Scapin, acte I, scène 3
Molière
1671
« HYACINTHE.
Ah ! Octave, est-il vrai ce que Silvestre vient de dire à Nérine ? Que votre père est de retour, et qu'il veut vous marier ?
OCTAVE.
Oui, belle Hyacinthe, et ces nouvelles m'ont donné une atteinte cruelle. Mais que vois-je ? Vous pleurez ! Pourquoi ces larmes ? Me soupçonnez-vous, dites-moi, de quelque infidélité, et n'êtes-vous pas assurée de l'amour que j'ai pour vous ?
HYACINTHE.
Oui, Octave, je suis sûre que vous m'aimez ; mais je ne le suis pas que vous m'aimiez toujours.
OCTAVE.
Eh ! Peut-on vous aimer, qu'on ne vous aime toute sa vie ?
HYACINTHE.
J'ai ouï dire, Octave, que votre sexe aime moins longtemps que le nôtre, et que les ardeurs que les hommes font voir sont des feux qui s'éteignent aussi facilement qu'ils naissent.
OCTAVE.
Ah ! Ma chère Hyacinthe, mon cœur n'est donc pas fait comme celui des hommes, et je sens bien, pour moi, que je vous aimerai jusqu'au tombeau.
HYACINTHE.
Je veux croire que vous sentez ce que vous dites, et je ne doute point que vos paroles ne soient sincères ; mais je crains un pouvoir qui combattra dans votre cœur les tendres sentiments que vous pouvez avoir pour moi. Vous dépendez d'un père qui veut vous marier à une autre personne, et je suis sûre que je mourrai si ce malheur m'arrive.
OCTAVE.
Non, belle Hyacinthe, il n'y a point de père qui puisse me contraindre à vous manquer de foi, et je me résoudrai à quitter mon pays, et le jour même, s'il est besoin, plutôt qu'à vous quitter. J'ai déjà pris, sans l'avoir vue, une aversion effroyable pour celle que l'on me destine, et, sans être cruel, je souhaiterais que la mer l'écartât d'ici pour jamais. Ne pleurez donc point, je vous prie, mon aimable Hyacinthe, car vos larmes tuent, et je ne les sans me sentir percer le cœur.
HYACINTHE.
Puisque vous le voulez, je veux bien essuyer mes larmes, et j'attendrai d'un œil constant, ce qu'il plaira au Ciel de résoudre de moi. »
Quelle convention théâtrale permet au spectateur d'apprendre ce qu'il se passe ?
Dans une pièce de théâtre, la double énonciation est le procédé par lequel un personnage, tout en s'adressant à un autre personnage sur scène, s'adresse également aux spectateurs. Ici, grâce au dialogue entre Octave et Hyacinthe, le spectateur apprend le mariage arrangé par le père de Hyacinthe. La réplique de Hyacinthe, « Ah ! Octave, est-il vrai ce que Silvestre vient de dire à Nérine ? que votre père est de retour, et qu'il veut vous marier ? », est à destination d'Octave mais aussi à destination des spectateurs.
Quel lien unit Octave et Hyacinthe ?
C'est un lien d'amour qui unit Octave et Hyacinthe. Les échanges de paroles entre eux nous montrent qu'ils sont amoureux : « Oui, Octave, je suis sûre que vous m'aimez ; mais je ne le suis pas que vous m'aimiez toujours. », « Eh ! Peut-on vous aimer, qu'on ne vous aime toute sa vie ? [...] je vous aimerai jusqu'au tombeau ».
À quel problème Octave est-il confronté ?
Le père d'Octave veut le marier avec une femme que ce dernier n'aime pas. Hyacinthe lui demande « Ah ! Octave, est-il vrai [...] que votre père est de retour, et qu'il veut vous marier ? » et Octave lui répond « Oui, belle Hyacinthe ».
Pourquoi Hyacinthe pleure-t-elle ?
Hyacinthe a peur qu'Octave ne l'aime plus dans le futur : « Oui, Octave, je suis sûre que vous m'aimez ; mais je ne le suis pas que vous m'aimiez toujours ».
Quelle image Hyacinthe a-t-elle des hommes ?
Hyacinthe pense que les hommes sont inconstants en amour, c'est-à-dire qu'ils changent facilement de sentiments : « J'ai ouï dire, Octave, que votre sexe aime moins longtemps que le nôtre, et que les ardeurs que les hommes font voir sont des feux qui s'éteignent aussi facilement qu'ils naissent ». Elle craint donc que, bien qu'Octave l'aime aujourd'hui, il ne l'aime plus à l'avenir.
Quelle figure incarne le père d'Octave ?
La figure du père incarne souvent l'autorité. Au XVIIe siècle, ce sont les pères qui décident du mariage de leur fils en leur imposant l'épouse de leur choix. Ce ne sont donc pas des mariages d'amour mais des mariages de raison fondés sur l'intérêt qu'ont les deux familles à marier leurs enfants. Et ce point pose souvent problème : les pères imposent leurs décisions à leurs enfants qui se révoltent contre cette injustice.
Quelle solution Octave envisage-t-il pour contrecarrer les plans de son père ?
Octave pense à s'enfuir plutôt que d'être contraint d'épouser une femme qu'il n'aime pas : « je me résoudrai à quitter mon pays, et le jour même, s'il est besoin, plutôt qu'à vous quitter ».
Quels sont les deux indices qui montrent qu'Octave n'a pas du tout envie d'épouser la femme que son père lui destine ?
Octave déteste cette femme sans jamais l'avoir vue (« J'ai déjà pris, sans l'avoir vue, une aversion effroyable pour celle que l'on me destine ») et il a envie qu'elle soit le plus loin de lui possible (« je souhaiterais que la mer l'écartât d'ici pour jamais »).
Quelle figure de style est employée dans l'extrait suivant ?
« car vos larmes tuent, et je ne les puis voir sans me sentir percer le cœur. »
La métaphore est une figure de style d'analogie permettant de comparer deux éléments sans utiliser de terme de comparaison. Dans cet extrait, les deux métaphores montrent qu'Octave a beaucoup de peine pour Hyacinthe et que les larmes de cette dernières l'affectent énormément. Il est parfois difficile de distinguer clairement une figure de style d'une autre. Il faut alors considérer l'effet provoqué dans l'ensemble. Ici, les larmes sont associées à des armes qui frappent Octave en plein cœur. Ces deux métaphores sont proches de l'hyperbole car, bien évidemment elles ne tuent pas réellement Octave. L'hyperbole exagère une idée pour l'accentuer dans le but de créer une forte impression. On peut dire que c'est une métaphore hyperbolique.
Quel lien se dessine entre Octave et son père ?
C'est un lien de conflit qui se tisse entre Octave et son père. Le père veut imposer une épouse à son fils et celui-ci ne semble pas du tout prêt à accepter cette situation. Il est décidé à s'opposer à ce projet de mariage. Cette scène est annonciatrice de la suite de la pièce. Octave va demander de l'aide à Scapin pour contrecarrer les projets de son père car il ne veut pas se marier avec la femme choisie par son père. Il désobéit à son père et enfreint le code de respect et d'autorité paternelle.