Quelles sont les principales caractéristiques de la tragédie classique ?
Que désigne l'idée d'"hybris" ?
Dans quelle pièce Racine parle-t-il de Néron ?
De quoi les personnages tragiques sont-ils victimes ?
En quoi consiste la règle de bienséance ?
Quel concept emprunté à Aristote justifie la portée morale de la tragédie ?
La tragédie est un genre théâtral qui naît dans l'Antiquité : elle est "l'art de représenter, de façon réglée, le dérèglement" (Forestier, Essai sur la tragédie, 2003). Elle connaît son Âge d'or au XVIIe, avec des dramaturges comme Racine et Corneille. On verra qu'elle se caractérise tout d'abord par sa forme très codifiée, par ses personnages et enfin, par sa portée morale.
Tout d'abord, la tragédie se caractérise par sa forme. Elle comporte cinq actes, écrits en alexandrins. Son intrigue se structure autour de l'exposition qui présente les personnages et met en place les enjeux de l'intrigue. Celle-ci est suivie du nœud, où se nouent les systèmes de conflits entre personnages, les difficultés qu'ils vont devoir résoudre. La tragédie s'achève par un dénouement qui apporte une conclusion à l'intrigue. Par ailleurs, la tragédie classique se doit de respecter la règle des trois unités exprimée ainsi par Boileau dans son Art poétique : "qu'en un lieu, en un jour, un seul fait accompli / tienne jusqu'à la fin le théâtre rempli". À ces unités s'ajoute la règle de bienséance qui interdit de représenter des comportements obscènes ou violents sur scène.
Dans un second temps, la tragédie est caractérisée par ses personnages qui sont forcément de noble naissance : ces figures sont souvent empruntées à des épisodes mythologiques ou historiques de l'Antiquité. La représentation tragique donne à voir le destin malheureux d'individus qui tentent vainement de lutter contre la fatalité qui les opprime, confrontés à des situations désespérées, source de conflits (avec eux-mêmes et les autres). Le dilemme tragique est, par exemple, très présent dans l'histoire de Phèdre : celle-ci, amoureuse d'Hippolyte, qui n'est autre que le fils de son mari, Thésée, elle est déchirée entre sa folle passion et sa raison. Leur caractère est également souvent marqué par l'hybris, la démesure antique, qui les pousse à vouloir défier les lois divines et à sortir de la place qui leur a été attribuée par le destin ou les règles sociales : le dénouement tragique intervient alors comme une punition qui a valeur de leçon pour le spectateur. On retrouve particulièrement cette idée dans le personnage de Néron que Racine met en scène dans Britannicus.
En effet, la tragédie est également caractérisée par sa portée morale : elle donne à voir des héros certes nobles mais qui ne sont pas parfaits afin de permettre aux spectateurs de s'identifier, de s'investir affectivement, de se reconnaître en eux. En cela, les dramaturges empruntent à Aristote l'idée de catharsis pour expliquer l'utilité de la représentation théâtrale : la catharsis postule en effet que les spectateurs, confrontés à la représentation d'émotions intenses et de passions destructrices, s'en trouvent libérés, "purgés" par l'effet de mise à distance induit par le spectacle tragique. Le personnage de Médée, chez Corneille, est à cet égard emblématique : trahie par Jason, à qui elle a tout donné, Médée la magicienne se livre à sa fureur et tue ses deux enfants pour se venger, offrant ainsi au spectateur un spectacle de folie et de débordement qui l'invite à conserver sa mesure. L'enjeu de la tragédie est donc susciter terreur et pitié pour purifier les spectateurs de pulsions négatives qui les empêcheraient de vivre harmonieusement en société et troubleraient le bon ordre public, la mesure chère au classicisme.
- La tragédie est composée de cinq actes, en alexandrins, structurés autour de l'exposition, du nœud et du dénouement. Elle respecte la règle des trois unités et la règle de bienséance.
- Les personnages tragiques sont souvent empruntés à l'Antiquité et sont victimes d'un destin malheureux.
- La représentation tragique doit être une représentation cathartique pour le spectateur.