Les relations de rivalité Question sur 8 points type bac

La galerie de personnages est restreinte dans la nouvelle mais, pour autant, quatre hommes s'articulent autour du personnage central, Marie. Parmi ces hommes, trois sont très jeunes, impétueux et fougueux. Un autre, Chabannes, se distingue d'eux car il est plus âgé et d'un tempérament plus calme.

Outre l'amour qu'ils ressentent tous pour la jeune Marie, ces personnages ont pour point commun d'être animés par une force qui les pousse à agir. Les trois jeunes hommes sont de valeureux hommes de guerre, ils se sont maintes fois illustrés au combat contre les protestants. Ce besoin d'agir s'explique en partie par l'époque. Au XVIe siècle, les hommes sont majeurs à 14 ans, l'espérance de vie oscille entre 30 et 35 ans en moyenne et la guerre s'ajoute à cela. Ces éléments font que les hommes ont davantage conscience du caractère éphémère de la vie et se lancent dans une sorte de fuite en avant.

Le quatrième homme, Chabannes, est différent de tous les autres personnages masculins. Il est fortement lié au prince de Montpensier dont il a été le précepteur avant d'être celui de sa femme. Il fait office de figure paternelle dans un monde où ces figures sont défaillantes, que ce soit le père de Marie ou celui du prince. Chabannes se distingue également des autres hommes par sa bonté et sa noblesse. Il reste fidèle à la parole donnée et lutte contre toute forme de fanatisme religieux. Il refuse de prendre les armes et de se battre. Ce qui l'anime n'est pas une soif de vivre comme les trois autres mais une soif de rédemption. Alors que dans la nouvelle les lecteurs ignorent pourquoi Chabannes s'est retiré des combats, une explication est donnée dans le film. Une scène montre Chabannes en train d'assassiner une femme enceinte. Il apparaît donc comme un personnage plus complexe, plus nuancé que les autres, plus touchant également car capable de se remettre en question. Il est guidé par l'esprit humaniste qui imprègne l'époque.

Tous les hommes mis en scène par Madame de Lafayette sont dotés d'une puissante personnalité et ce premier aspect peut conduire à une certaine rivalité, chacun cherchant à s'imposer. Le duc de Guise, par exemple, est très impulsif, il semble aimer Marie d'un amour sincère et passionnel. Pour autant, il l'abandonnera à la fin de la nouvelle, lui brisant le cœur. Homme de guerre, chasseur, il est fougueux et suit davantage son instinct que sa raison. Le prince de Montpensier est un homme valeureux qui sait se montrer courageux sur le champ de bataille. Il est lié à Chabannes en qui il a confiance car il a été son élève. Lors de son départ pour la guerre, il lui confie sa femme et, plus tard, lui demandera des conseils pour plaire à sa femme et se rapprocher d'elle. Attentif à Marie, c'est également un mari possessif et jaloux car il a conscience du désir des autres hommes. Enfin, le personnage d'Anjou dispose d'un esprit vif et aiguisé. C'est un personnage très franc, ce qui peut parfois heurter, surtout dans le monde des courtisans marqué par une hypocrisie permanente. Perspicace, il comprend rapidement lors de l'épisode de la barque que Marie et de Guise se connaissent, mais il n'en restera pas moins meurtri en apprenant que Marie en aime un autre que lui.

Une scène est particulièrement symbolique, il s'agit du dîner à Champigny au cours duquel tous les hommes aimant Marie se trouvent réunis autour de la table. Le duc d'Anjou affiche sa supériorité et il semble impossible d'aller à l'encontre de son bon droit, il est le frère du roi. Le duc de Guise est à son habitude impétueux et passionné car certain d'être celui qui, des quatre hommes réunis, a l'amour de Marie, il provoque donc le prince. Face à ces deux hommes au tempérament très affirmé, le prince de Montpensier, qui sait faire preuve d'un très grand courage sur le champ de bataille, se montre en position de faiblesse. Il est humilié et sa jalousie maladive le fait souffrir. Il se montrera violent envers sa femme à l'issue du repas, lui reprochant le désir des autres hommes. Enfin, Chabannes est isolé du reste du groupe, tout d'abord car il n'est pas un homme de guerre mais un humaniste, ensuite car il est plus âgé qu'eux et enfin parce qu'il ne veut pas faire souffrir Philippe qu'il apprécie même s'il voue une haine sourde à Guise.

Ces jeunes personnages ont donc des caractères fougueux qui peuvent s'exprimer lors des nombreuses batailles des guerres de religion. Dans la nouvelle, les trois hommes sont cités lors des batailles qui suivent le siège de la ville de Poitiers par les protestants. Le duc de Guise défend la ville avec beaucoup de courage, ce qui lui permet d'accomplir des faits d'armes glorieux. Par la suite, le duc d'Anjou participe à la bataille de Moncontour et libère Saint-Jean-d'Angély. Il est dit qu'il quitte le front, malade. Le commandement revient donc au prince de Montpensier qui dirige les troupes jusqu'à la fin de la troisième guerre de religion en août 1570. Les trois hommes sont tous les trois de valeureux combattants, des meneurs d'hommes qui s'illustrent au combat et qui là aussi s'affrontent afin d'en tirer une certaine gloire.

Marie est au centre de toutes les attentions amoureuses. Le premier amour auquel elle succombe est celui qui la lie au duc de Guise. Cet amour remonte à une époque insouciante, celle d'avant son mariage, mais elle doit y renoncer sur ordre de son père. Toutefois, elle ne cessera jamais de l'aimer et cela la conduira à sa perte. Plus tard dans la nouvelle, Marie épouse contre son gré le prince de Montpensier et, malgré le traumatisme lié à la nuit de noces et son départ quasi immédiat, elle éprouvera pour lui une sorte de tendresse amoureuse. Le prince est un homme qui sait se montrer délicat, à l'écoute de son épouse. Lors de son retour de la guerre, il lui laisse le temps de s'habituer à nouveau à lui. Cependant, la jalousie de ce dernier contribue à l'éloigner de lui. Pendant son absence, le prince confie sa femme à l'homme en qui il a confiance, Chabannes. Ce dernier prendra en charge l'éducation de la jeune femme en suivant les principes de l'éducation humaniste. Ensemble, ils aborderont différents sujets et se rapprocheront à tel point que Chabannes osera, un jour, avouer son amour à Marie. Alors que cette dernière lui avait parlé de l'amour qu'elle avait ressenti pour de Guise, elle se montre impitoyable envers son ami et le rejette de manière cruelle. Chabannes est le rival de deux hommes : Montpensier, pour qui il a beaucoup de tendresse, et De Guise, qu'il jalouse car il représente le fantasme de Marie. Pour protéger l'homme que Marie aime, il va même jusqu'à se faire passer pour son amant auprès de son mari, preuve d'une abnégation absolue. Enfin, l'épisode de la barque fait se rencontrer le duc d'Anjou, frère du roi, et Marie. Le duc d'Anjou tombera amoureux de la jeune femme. Cette entrevue permet à Marie et Guise de se retrouver. Marie feint une indifférence totale, elle souhaite se persuader qu'elle est guérie du mal qui la rongeait mais Guise réaffirme tout l'amour qu'il lui porte depuis plusieurs années déjà. Ainsi la rivalité entre les deux hommes prend racine lors de cet épisode de la barque, même si d'Anjou ne le comprendra que plus tard.

Les quatre hommes ont bien conscience qu'ils ne sont pas les seuls à convoiter l'amour de Marie, et cette rivalité va complexifier leurs rapports jusqu'à la haine. Le prince est un mari jaloux qui peut se montrer très violent, souhaitant affirmer l'emprise qu'il a sur sa femme, faisant d'elle un objet. Une rivalité amoureuse s'établit entre les personnages masculins afin d'obtenir la jeune femme qui est assimilée à un trophée. Cette tension est accentuée dans le film de Tavernier qui met en scène des affrontements entre de Guise et Philippe lors de l'annonce du mariage arrangé entre la jeune femme et le prince. Guise se jette sur son rival et le provoquera à de nombreuses reprises, à la guerre comme à la cour de France. Cela va même jusqu'à un duel au Louvre au cours duquel ils se seraient entretués si Anjou n'était pas intervenu. Enfin, Chabannes est jaloux du mari de la jeune femme et Anjou voue une haine profonde à Guise lorsqu'il apprend l'amour qu'elle lui porte.