Après avoir lu le texte suivant, répondre aux questions qui permettront de l'étudier.
Bel-Ami
Guy de Maupassant
1885
« "Assieds-toi, dit Forestier, je reviens dans cinq minutes."
Et il disparut par une des trois sorties qui donnaient dans ce cabinet. Une odeur étrange, particulière, inexprimable, l'odeur des salles de rédaction, flottait dans ce lieu. Duroy demeurait immobile, un peu intimidé, surpris surtout. De temps en temps des hommes passaient devant lui, en courant, entrés par une porte et partis par l'autre avant qu'il eût le temps de les regarder.
C'étaient tantôt des jeunes gens, très jeunes, l'air affairé, et tenant à la main une feuille de papier qui palpitait au vent de leur course ; tantôt des ouvriers compositeurs, dont la blouse de toile tachée d'encre laissait voir un col de chemise bien blanc et un pantalon de drap pareil à celui des gens du monde ; et ils portaient avec précaution des bandes de papier imprimé, des épreuves fraîches, tout humides. Quelquefois un petit monsieur entrait, vêtu avec une élégance trop apparente, la taille trop serrée dans la redingote, la jambe trop moulée sous l'étoffe, le pied étreint dans un soulier trop pointu, quelque reporter mondain apportant les échos de la soirée.
D'autres encore arrivaient, graves, importants, coiffés de hauts chapeaux à bords plats, comme si cette forme les eût distingués du reste des hommes.
Forestier reparut, tenant par le bras un grand garçon maigre, de trente à quarante ans, en habit noir et en cravate blanche, très brun, la moustache roulée en pointes aiguës, et qui avait l'air insolent et content de lui.
Forestier lui dit :
"Adieu, cher maître."
L'autre lui serra la main :
"Au revoir, mon cher", et il descendit l'escalier en sifflotant, la canne sous le bras.
Duroy demanda :
"Qui est-ce ?
— C'est Jacques Rival, tu sais, le fameux chroniqueur, le duelliste. Il vient de corriger ses épreuves. Garin, Montel et lui sont les trois premiers chroniqueurs d'esprit et d'actualité que nous ayons à paris. Il gagne ici trente mille francs par an pour deux articles par semaine." »
Quel est le genre de ce texte ?
Il s'agit d'un texte romanesque. C'est un extrait du roman de Guy de Maupassant, Bel-Ami.
Quel est le type de texte qui caractérise le plus l'extrait proposé ?
Cet extrait est principalement descriptif. Georges Duroy découvre les locaux du journal La Vie française et les décrit en donnant plus précisément des détails sur les fonctions de chaque personne qui travaille dans ce journal.
Quel est le point de vue utilisé dans cet extrait ?
Le point de vue utilisé dans cet extrait est le point de vue interne : tout est vu à travers les yeux de Georges Duroy qui observe la scène, le fonctionnement d'un journal avec ses hommes à l'œuvre. Le point de vue interne se confirme dès le début du texte, lorsque le narrateur décrit l'odeur sentie par Georges : « Une odeur étrange, particulière, inexprimables [...] ».
Où se trouve exactement Georges Duroy dans le journal ?
Dans le journal, Georges Duroy se trouve dans le couloir face à la salle de rédaction. L'existence des « trois sorties » suppose la configuration d'un couloir pour les desservir et l'« odeur étrange, particulière, inexprimable, l'odeur des salles de rédaction » qui lui vient laisse penser que le personnage se situe en face d'elles. La position de Georges Duroy dans le couloir face à la salle de rédaction lui permet de voir exactement ce qu'il s'y passe, d'observer les personnes en train de travailler.
Quelles sont les personnes que voit défiler Georges Duroy ?
Les personnes que voit défiler Georges Duroy sont :
- des jeunes gens qui servent de commis, d'aide en portant du courrier, des papiers importants d'un bureau à l'autre (« des jeunes gens, très jeunes, l'air affairé, et tenant à la main une feuille de papier qui palpitait au vent de leur course ; ») ;
- des ouvriers compositeurs « dont la blouse de toile tachée d'encre laissait voir un col de chemise bien blanc et un pantalon de drap pareil à celui des gens du monde ; et ils portaient avec précaution des bandes de papier imprimé, des épreuves fraîches, tout humides. » ;
- un reporter qui fait preuve d'une forme d'élégance extravagante (« Quelquefois un petit monsieur entrait, vêtu avec une élégance trop apparente, la taille trop serrée dans la redingote, la jambe trop moulée sous l'étoffe, le pied étreint dans un soulier trop pointu, quelque reporter mondain apportant les échos de la soirée. ») ;
- et enfin, le chroniqueur que Forestier indique à Georges Duroy (« Jacques Rival, tu sais, le fameux chroniqueur, le duelliste. Il vient de corriger ses épreuves. »).
Finalement, Georges Duroy voit défiler devant lui tous ceux qui font la vie d'un journal.
Quelles sont les impressions et les sensations ressenties par Duroy au cours de son observation des locaux du journal ?
Au cours de son observation des locaux du journal, Georges Duroy est impressionné et intimidé, comme le suggère l'accumulation des adjectifs dans cette phrase :
« Duroy demeurait immobile, un peu intimidé, surpris surtout. »
Duroy ne connaît rien au journalisme et à son fonctionnement. Il découvre tout et il ne peut donc qu'être impressionné, resté ainsi « immobile ».
Sur quelle figure de style cette phrase est-elle construite ?
« C'étaient tantôt des jeunes gens, très jeunes, l'air affairé, et tenant à la main une feuille de papier qui palpitait au vent de leur course ; tantôt des ouvriers compositeurs, dont la blouse de toile tachée d'encre laissait voir un col de chemise bien blanc et un pantalon de drap pareil à celui des gens du monde [...] »
La figure de style sur laquelle est construite cette phrase est le parallélisme de construction.
« C'étaient tantôt des jeunes gens, très jeunes, l'air affairé, et tenant à la main une feuille de papier qui palpitait au vent de leur course ; tantôt des ouvriers compositeurs, dont la blouse de toile tachée d'encre laissait voir un col de chemise bien blanc et un pantalon de drap pareil à celui des gens du monde [...] »
Il est mis en évidence par l'utilisation des deux adverbes « tantôt » qui servent à présenter deux personnes différentes dans le journal, les « jeunes gens » et les « ouvriers compositeurs ».
La phrase accueille de nombreux détails sur le physique (« très jeunes, l'air affairé »), sur les vêtements des personnages (« la blouse de toile tachée d'encre laissait voir un col de chemise bien blanc et un pantalon de drap pareil à celui des gens du monde « ) afin que la description soit précise et que le lecteur puisse se faire une bonne représentation de l'univers d'un journal.
Quelle est la figure de style utilisée dans l'expression « un pantalon de drap pareil à celui des gens du monde » ?
La figure de style utilisée dans cette expression, « un pantalon de drap pareil à celui des gens du monde », est une comparaison, visible grâce à l'outil de comparaison « pareil ». La matière du pantalon des « ouvriers compositeurs » est comparée à celle des vêtements « des gens du monde ». Par cette comparaison, Balzac souligne la supériorité hiérarchique des « ouvriers compositeurs » par rapport aux simples jeunes gens responsables des courses.