Après avoir lu le texte suivant, répondre aux questions qui permettront de l'étudier.
Vendredi ou la Vie sauvage
Michel Tournier
© Gallimard, 1971
« Ensuite Robinson alla s'étendre sur le pont pour faire la sieste comme il en avait l'habitude. Au-dessus de lui, la pointe du mât de hune décrivait des cercles irréguliers dans un ciel parfaitement bleu où s'était égaré un croissant de lune translucide. En tournant la tête, il voyait Speranza, une bande de sable blond, puis un amas de verdure, enfin l'entassement du chaos rocheux.
C'est alors qu'il comprit qu'il ne quitterait jamais l'île. Ce Whitebird avec ses hommes, c'était l'envoyé d'une civilisation où il ne voulait pas retourner. Il se sentait jeune, beau et fort, à condition de demeurer à Speranza avec Vendredi. Sans le savoir, Joseph et Hunter lui avaient appris que pour eux, il avait cinquante ans. S'il s'en allait avec eux, il serait un vieil homme aux cheveux gris, à l'allure digne, et il deviendrait bête et méchant comme eux. Non, il resterait fidèle à la vie nouvelle que lui avait enseignée Vendredi.
Lorsqu'il fit part de sa décision de demeurer sur l'île, seul Joseph manifesta de la surprise. Hunter n'eut qu'un sourire glacé. Au fond il était peut-être soulagé de n'avoir pas deux passagers supplémentaires à embarquer sur un navire étroit où la place était chichement distribuée. [...]
En reprenant pied sur ses terres, Robinson éprouva un immense soulagement. Le Whitebird et ses hommes avaient apporté le désordre et la destruction dans l'île heureuse où il avait mené une vie idéale avec Vendredi. Mais qu'importait ? Aux premières lueurs de l'aube, le navire anglais lèverait l'ancre et reprendrait sa place dans le monde civilisé. Robinson avait fait comprendre au commandant qu'il ne souhaitait pas que l'existence et la position de son île sur la carte fussent révélées par l'équipage du Whitebird. Le commandant avait promis, et Robinson savait qu'il respecterait son engagement. Robinson et Vendredi avaient encore de belles et longues années de solitude devant eux. »
Dans le premier paragraphe, où se trouve Robinson ?
Dans le premier paragraphe, Robinson est sur un bateau. C'est le vocabulaire du bateau qui nous l'indique. Robinson est allongé sur le « pont » et au-dessus de sa tête se situe le « mât de hune » .
Qu'est-ce que Speranza ?
Speranza est l'île sur laquelle habitent Robinson et Vendredi. Plusieurs indices dans le texte l'indiquent. Tout d'abord depuis le bateau sur lequel il se trouve, Robinson « voyait Speranza » qui est décrite avec toutes les caractéristiques d'une île « une bande de sable blond ». Ensuite, on retrouve à plusieurs reprises le terme « île » et le narrateur explique que jamais Robinson ne « quitterait l'île » et qu'il voulait « demeurer à Speranza ».
Quel est le point de vue du narrateur dans cet extrait ?
Le narrateur est extérieur à l'histoire (il ne fait pas partie des personnages) et son point de vue est omniscient. Un narrateur omniscient est un narrateur qui connaît tout des personnages : leurs faits et gestes, leur passé et leur futur, ainsi que leurs pensées. Dans cet extrait, le narrateur connaît les habitudes de Robinson « pour faire la sieste comme il en avait l'habitude » mais aussi ses pensées « C'est alors qu'il comprit qu'il ne quitterait jamais l'île. ». De plus, il connaît les pensées des autres personnages « Hunter n'eut qu'un sourire glacé. Au fond il était peut-être soulagé de n'avoir pas deux passagers supplémentaires à embarquer ».
Quelle est la figure de style employée dans « Hunter n'eut qu'un sourire glacé » ?
Une métaphore est une figure de style qui consiste établir un rapport de ressemblance entre deux éléments sans l'aide d'un outil de comparaison. Ici, le sourire d'Hunter est « glacé » ce qui signifie qu'il semble figé et froid. Cela montre qu'Hunter n'est pas surpris du choix de Robinson et qu'il le considère même avec un peu de mépris.
Dans quel paragraphe Robinson se rend-il compte qu'il ne veut plus quitter son île ?
C'est dans le 2e paragraphe que Robinson se rend compte qu'il préfère rester sur son île. « C'est alors qu'il comprit qu'il ne quitterait jamais l'île » et « une civilisation où il ne voulait pas retourner » l'indiquent.
Pourquoi Robinson ne veut-il plus quitter son île ?
Robinson ne veut plus quitter son île car il comprend, après avoir contemplé Speranza depuis le bateau, qu'il se sent lui-même (« Il se sentait jeune, beau et fort, à condition de demeurer à Speranza ») et chez lui dans cette île (« dans l'île heureuse où il avait mené une vie idéale avec Vendredi »). De plus, cette vie qu'il y mène lui convient parfaitement. Enfin, l'amitié de Vendredi lui est tellement précieuse qu'il ne souhaite plus le quitter.
Quelles sont les deux valeurs qu'incarne Robinson en choisissant de rester sur l'île ?
Robinson, après avoir reçu l'amitié totale de Vendredi, lui fait don de la sienne et de sa présence en préférant rester vivre à ses côtés, sur l'île, dans une vie vraie, sincère, sans artifice ni compromission.
Dans l'extrait suivant, quelle est la forme du discours ?
« Au-dessus de lui, la pointe du mât de hune décrivait des cercles irréguliers dans un ciel parfaitement bleu où s'était égaré un croissant de lune translucide. En tournant la tête, il voyait Speranza, une bande de sable blond, puis un amas de verdure, enfin l'entassement du chaos rocheux. »
Le discours descriptif sert à présenter une personne, un lieu ou un objet. Dans cet extrait, c'est le paysage qui est décrit. La description sert à marquer une pause dans l'action. Elle permet au lecteur de mieux se représenter le lieu dans lequel se trouve Robinson. On repère la description dans cet extrait car le narrateur emploie l'imparfait « il voyait » et utilise le champ lexical du paysage « bande de sable blond, amas de verdure, chaos rocheux ». L'île décrite semble exotique et sauvage.
Dans l'extrait suivant, à quoi les mots « au-dessus », « puis » et enfin » servent-ils ?
« Au-dessus de lui, la pointe du mât de hune décrivait des cercles irréguliers dans un ciel parfaitement bleu où s'était égaré un croissant de lune translucide. En tournant la tête, il voyait Speranza, une bande de sable blond, puis un amas de verdure, enfin l'entassement du chaos rocheux. »
Ces trois adverbes servent à organiser la description. Cette description suit le regard de Robinson, tout d'abord tourné vers le ciel « au-dessus de lui », puis tourné vers l'île Speranza, selon des effets de perspective, et de changements de plan :
- « une bande de sable blond » au premier plan ;
- « puis un amas de verdure » au second plan ;
- « enfin l'entassement du chaos rocheux » à l'arrière-plan.
À quelle étape du schéma narratif cet extrait appartient-il ?
L'élément de résolution, que l'on appelle aussi le « dénouement », correspond à la fin du récit d'aventures. C'est l'élément qui clôt le récit et permet de retrouver un équilibre qui correspond à la situation finale. Ici, Robinson, qui avait fait naufrage sur Speranza et souhaitait rentrer chez lui, décide finalement de rester sur l'île car il s'y sent heureux. Cette décision de quitter le bateau et de retourner sur l'île constitue donc l'élément de résolution. On apprendra finalement, dans la situation finale, que Vendredi son cher compagnon a décidé, lui, de s'embarquer sur le bateau pour découvrir la civilisation européenne. Robinson reste donc seul sur l'île sans Vendredi, mais avec un nouveau compagnon, Dimanche, une jeune mousse qui a fui les mauvais traitements qu'on lui faisait subir sur le Whitebird.