Après avoir lu le texte suivant, répondre aux questions qui permettront de l'étudier.
Le Cid, acte I, scène 5
Pierre Corneille
1637
« DON DIÈGUE.
Rodrigue, as-tu du cœur ?
DON RODRIGUE.
Tout autre que mon père
L'éprouverait sur l'heure.
DON DIÈGUE.
Agréable colère !
Digne ressentiment à ma douleur bien doux !
Je reconnais mon sang à ce noble courroux ;
Ma jeunesse revit en cette ardeur si prompte.
Viens, mon fils, viens, mon sang, viens réparer ma honte ;
Viens me venger.
DON RODRIGUE.
De quoi ?
DON DIÈGUE.
D'un affront si cruel,
Qu'à l'honneur de tous deux il porte un coup mortel :
D'un soufflet. L'insolent en eût perdu la vie ;
Mais mon âge a trompé ma généreuse envie :
Et ce fer que mon bras ne peut plus soutenir,
Je le remets au tien pour venger et punir.
Va contre un arrogant éprouver ton courage :
Ce n'est que dans le sang qu'on lave un tel outrage ;
Meurs ou tue. Au surplus, pour ne te point flatter,
Je te donne à combattre un homme à redouter ;
Je l'ai vu, tout couvert de sang et de poussière,
Poser partout l'effroi dans une armée entière.
J'ai vu par sa valeur cent escadrons rompus ;
Et pour t'en dire encor quelque chose de plus,
Plus que brave soldat, plus que grand capitaine,
C'est….
DON RODRIGUE.
De grâce, achevez.
DON DIÈGUE.
Le père de Chimène.
DON RODRIGUE.
Le…
DON DIÈGUE.
Ne réplique point, je connais ton amour ;
Mais qui peut vivre infâme est indigne du jour.
Plus l'offenseur est cher, et plus grande est l'offense.
Enfin tu sais l'affront, et tu tiens la vengeance.
Je ne te dis plus rien. Venge-moi, venge-toi ;
Montre-toi digne fils d'un père tel que moi. »
Quel est le genre littéraire de ce texte ?
Il s'agit d'un texte théâtral. C'est une pièce de théâtre écrite par Pierre Corneille et intitulée Le Cid. On remarque l'aspect théâtral grâce à la disposition des phrases sur la page et à leur présentation avec la précision du personnage qui parle à chaque fois. Il n'y a pas de narrateur, les personnages s'adressent directement les uns aux autres.
De quelle manière les répliques sont-elles écrites ?
Les répliques sont écrites en vers, plus exactement en alexandrins (vers de 12 syllabes). Au XVIIe siècle, il est d'usage d'écrire les pièces de théâtre en vers.
À quel moment de l'œuvre le passage étudié se situe-t-il ?
Ce passage se situe à la scène 5 de l'acte I : le chiffre romain (I) situe toujours l'acte, l'autre en chiffre arabe (5) situe toujours la scène. Ce passage se situe donc au début de la pièce, plus exactement dans l'acte d'exposition : l'histoire commence, l'action est en train de prendre place.
Quelles sont les relations entre les deux personnages ?
Les relations entre les deux personnages sont celles d'un père et d'un fils : Don Diègue est le père âgé de Don Rodrigue, son fils qui est jeune et vaillant. Dès le vers 2, Don Rodrigue en donne l'indication « tout autre que mon père ». Don Diègue fait également allusion à leurs liens, à plusieurs reprises : « je reconnais mon sang », « mon fils », « mon sang », « digne fils d'un père ».
Quelle demande le père fait-il au fils ?
Le père demande au fils de le venger en duel contre le père de Chimène, la jeune fille dont Rodrigue est amoureux : « Viens me venger. », « D'un affront si cruel / Qu'à l'honneur de tous deux il porte un coup mortel ». Dans ce passage, on relève ainsi de nombreuses répétitions du verbe « venger ».
Quelle est la raison qui oblige Don Rodrigue à venger son père, Don Diègue ?
La raison qui oblige Don Rodrigue à venger son père, Don Diègue, est le soufflet que ce dernier a reçu : « Qu'à l'honneur de tous deux il porte un coup mortel : / D'un soufflet. ». Don Diègue a été en effet déshonoré par Don Gomès, le Comte de Gormas, père de Chimène, qui lui a donné une gifle. Par amour pour son père, Don Rodrigue doit le venger au cours d'un duel contre Don Gomès. Le fils doit sauver l'honneur de son père, c'est son devoir.
Que signifient les points de suspension dans la réponse de Don Rodrigue, « Le… » ?
Les points de suspension dans la réponse de Don Rodrigue, « Le… », signifient son malaise car il va devoir affronter en duel le père de la femme qu'il aime et très vraisemblablement le tuer pour venger son père. Il est donc très mal à l'aise car il est pris dans un dilemme : venger son père ou sauver son amour pour Chimène, fille de Don Gomès.
Quelle est la figure de style utilisée dans les vers suivants ?
« Je te donne à combattre un homme à redouter ;
Je l'ai vu, tout couvert de sang et de poussière,
Poser partout l'effroi dans une armée entière.
J'ai vu par sa valeur cent escadrons rompus ;
Et pour t'en dire encor quelque chose de plus,
Plus que brave soldat, plus que grand capitaine,
C'est… »
La figure de style utilisée dans les vers précédents est l'hyperbole. Don Diègue cherche à impressionner, mais également à préparer, son fils au duel en soulignant la force extraordinaire de son adversaire le Comte de Gormas, père de Chimène, avec des expressions comme « tout couvert », « partout », « armée entière », « cent escadrons rompus », l'utilisation du superlatif « plus que ».
Quel est le champ lexical dominant dans l'extrait proposé ?
Le champ lexical dominant dans l'extrait proposé est celui de la colère. Il se manifeste à travers les mots suivants : « colère », « ressentiment », « venger », « outrage », etc. Don Diègue est très énervé contre le père de Chimène, ce qui se manifeste tout au long du passage étudié.
Quel est le type de phrase utilisé dans le vers « Digne ressentiment à ma douleur bien doux ! » ?
C'est une phrase exclamative, comme le souligne l'utilisation du point d'exclamation. Ce type de phrase contribue à exprimer la colère qui habite Don Diègue, face à l'affront dont il est victime.
Quelle est la valeur du présent de l'indicatif dans le vers « Ce n'est que dans le sang qu'on lave un tel outrage » ?
La valeur du présent de l'indicatif dans ce vers, « Ce n'est que dans le sang qu'on lave un tel outrage », est le présent de vérité générale. Le père dispense une leçon de morale, une règle de conduite à son fils, Don Rodrigue.
Quelle est la valeur du présent de l'indicatif dans le vers « Je te donne à combattre un homme à redouter » ?
La valeur du présent de l'indicatif dans ce vers, « Je te donne à combattre un homme à redouter », est celle du futur proche car Don Diègue donne à Don Rodrigue une mission qu'il va devoir accomplir très prochainement, celle du duel. La valeur de futur proche correspond à une action qui ne s'est pas encore déroulée et qui va se passer bientôt.