Dans quelles propositions a-t-on transformé chacune des scènes tragiques suivantes en scènes comiques ?
CRÉON :
Tu aimes Hémon ?
ANTIGONE :
Oui, j'aime Hémon. J'aime un Hémon dur et jeune ; un Hémon exigeant et fidèle, comme moi.
(Jean Anouilh, Antigone)
Au voleur ! Au voleur ! À l'assassin ! Au meurtrier ! Justice, juste ciel ! Je suis perdu, je suis assassiné, on m'a coupé la gorge, on m'a dérobé mon argent. Qui peut-ce être ? Qu'est-il devenu ? Où est-il ? Où se cache-t-il ? Que ferai-je pour le trouver ? Où courir ? Où ne pas courir ? N'est-il point là ? N'est-il point ici ? Qui est-ce ?
(Molière, L'Avare)
ALAIN :
C'est que la jalousie... Entends-tu bien, Georgette,
Est une chose... là... qui fait qu'on s'inquiète...
Et qui chasse les gens d'autour d'une maison.
Je m'en vais te bailler une comparaison,
Afin de concevoir la chose davantage.
Dis-moi, n'est-il pas vrai, quand tu tiens ton potage,
Que si quelque affamé venait pour en manger,
Tu serais en colère, et voudrais le charger ?
GEORGETTE :
Oui, je comprends cela.
ALAIN :
C'est justement tout comme.
La femme est en effet le potage de l'homme ;
Et quand un homme voit d'autres hommes parfois,
Qui veulent dans sa soupe aller tremper leurs doigts,
Il en montre aussitôt une colère extrême.
(Molière, L'École des femmes)
- Le comique de la scène repose sur la confrontation des paysans et sur la trivialité de la comparaison entre femme et potage.
- La scène tragique doit redonner sa noblesse au sentiment de la jalousie qui est ici décrit : cette émotion est souvent un ressort de la tragédie.
- Le niveau de langue doit être changé, ainsi que les comparants utilisés par Alain : il ne doit plus être question de l'innocence comique de Georgette comme ressort de la scène. Ici, pour décrire la jalousie, on pourra utiliser la référence mythologique, souvent présente dans la tragédie.
- On pourra utiliser le vouvoiement pour donner un sentiment de noblesse et on veillera à changer la ponctuation, notamment les points de suspension qui invitent à un jeu comique d'hésitation.
On peut par exemple écrire la scène suivante :
ALAIN :
Hélas ! la jalousie, écoutez-moi, Georgette,
Est un sentiment fort qui fait que l'on s'inquiète,
Qui nous rend solitaire et fait perdre raison.
Je voudrais utiliser une comparaison,
Afin de concevoir la chose davantage.
Voyez-donc la compagne de Zeus, Héra,
Et les profondes douleurs où ce dieu la plongea
Par la répétition de ses frasques amoureuses.
GEORGETTE :
Je connais ces histoires.
ALAIN :
Certes, elles sont fabuleuses.
Mais le sentiment, lui, est bel et bien réel ;
Et quand un homme voit les avances déplacées
Que des galants frivoles font à l'objet aimé,
Il n'en peut concevoir qu'un profond déplaisir.
PÈRE UBU :
Eh bien, mes amis, je suis d'avis d'empoisonner simplement le roi en lui fourrant de l'arsenic dans son déjeuner. Quand il voudra le brouter il tombera mort, et ainsi je serai roi.
TOUS :
Fi, le sagouin !
PÈRE UBU :
Eh quoi, cela ne vous plaît pas ? Alors, que Bordure donne son avis.
(Alfred Jarry, Ubu roi)
LADY MACBETH :
Était-elle donc ivre, l'espérance dans laquelle vous vous drapiez ? s'est-elle endormie depuis ? et ne fait-elle que se réveiller pour verdir et pâlir ainsi devant ce qu'elle contemplait si volontiers ? Désormais je ferai le même cas de ton amour.
(William Shakespeare, MacBeth)
Quoi ! Mon père trahi, les éléments forcés,
D'un frère dans la mer les membres dispersés,
Lui font-ils présumer mon audace épuisée ?
(Pierre Corneille, Médée)