Adapté de Pondichéry, 2008, voie S
Écrivez la lettre d'un lecteur mécontent à Victor Hugo. Celui-ci n'a pas apprécié le poème "J'aime l'araignée" et s'en explique.
Texte A : Victor Hugo, "J'aime l'araignée", Les Contemplations, Livre III, "Les Luttes et les rêves", XXVII
1856
J'aime l'araignée et j'aime l'ortie,
Parce qu'on les hait ;
Et que rien n'exauce et que tout châtie
Leur morne souhait ;
Parce qu'elles sont maudites, chétives,
Noirs êtres rampants ;
Parce qu'elles sont les tristes captives
De leur guet-apens ;
Parce qu'elles sont prises dans leur œuvre ;
Ô sort ! fatals nœuds !
Parce que l'ortie est une couleuvre,
L'araignée un gueux ;
Parce qu'elles ont l'ombre des abîmes,
Parce qu'on les fuit,
Parce qu'elles sont toutes deux victimes
De la sombre nuit.
Passants, faites grâce à la plante obscure,
Au pauvre animal.
Plaignez la laideur, plaignez la piqûre,
Oh ! plaignez le mal !
Il n'est rien qui n'ait sa mélancolie ;
Tout veut un baiser.
Dans leur fauve horreur, pour peu qu'on oublie
De les écraser,
Pour peu qu'on leur jette un œil moins superbe1,
Tout bas, loin du jour,
La mauvaise bête et la mauvaise herbe
Murmurent : Amour !
1 Ici : méprisant.
Quel registre de langue ne peut pas être utilisé dans la réponse rédigée ?
Texte A : Victor Hugo, "J'aime l'araignée", Les Contemplations, Livre III, "Les Luttes et les rêves", XXVII
1856
J'aime l'araignée et j'aime l'ortie,
Parce qu'on les hait ;
Et que rien n'exauce et que tout châtie
Leur morne souhait ;
Parce qu'elles sont maudites, chétives,
Noirs êtres rampants ;
Parce qu'elles sont les tristes captives
De leur guet-apens ;
Parce qu'elles sont prises dans leur œuvre ;
Ô sort ! fatals nœuds !
Parce que l'ortie est une couleuvre,
L'araignée un gueux ;
Parce qu'elles ont l'ombre des abîmes,
Parce qu'on les fuit,
Parce qu'elles sont toutes deux victimes
De la sombre nuit.
Passants, faites grâce à la plante obscure,
Au pauvre animal.
Plaignez la laideur, plaignez la piqûre,
Oh ! plaignez le mal !
Il n'est rien qui n'ait sa mélancolie ;
Tout veut un baiser.
Dans leur fauve horreur, pour peu qu'on oublie
De les écraser,
Pour peu qu'on leur jette un œil moins superbe1,
Tout bas, loin du jour,
La mauvaise bête et la mauvaise herbe
Murmurent : Amour !
1 Ici : méprisant.
À travers Victor Hugo, quel courant littéraire doit être critiqué dans la lettre ?
Texte A : Victor Hugo, "J'aime l'araignée", Les Contemplations, Livre III, "Les Luttes et les rêves", XXVII
1856
J'aime l'araignée et j'aime l'ortie,
Parce qu'on les hait ;
Et que rien n'exauce et que tout châtie
Leur morne souhait ;
Parce qu'elles sont maudites, chétives,
Noirs êtres rampants ;
Parce qu'elles sont les tristes captives
De leur guet-apens ;
Parce qu'elles sont prises dans leur œuvre ;
Ô sort ! fatals nœuds !
Parce que l'ortie est une couleuvre,
L'araignée un gueux ;
Parce qu'elles ont l'ombre des abîmes,
Parce qu'on les fuit,
Parce qu'elles sont toutes deux victimes
De la sombre nuit.
Passants, faites grâce à la plante obscure,
Au pauvre animal.
Plaignez la laideur, plaignez la piqûre,
Oh ! plaignez le mal !
Il n'est rien qui n'ait sa mélancolie ;
Tout veut un baiser.
Dans leur fauve horreur, pour peu qu'on oublie
De les écraser,
Pour peu qu'on leur jette un œil moins superbe1,
Tout bas, loin du jour,
La mauvaise bête et la mauvaise herbe
Murmurent : Amour !
1 Ici : méprisant.
Quel pronom personnel l'auteur de la lettre doit-il utiliser en s'adressant à Victor Hugo ?
Texte A : Victor Hugo, "J'aime l'araignée", Les Contemplations, Livre III, "Les Luttes et les rêves", XXVII
1856
J'aime l'araignée et j'aime l'ortie,
Parce qu'on les hait ;
Et que rien n'exauce et que tout châtie
Leur morne souhait ;
Parce qu'elles sont maudites, chétives,
Noirs êtres rampants ;
Parce qu'elles sont les tristes captives
De leur guet-apens ;
Parce qu'elles sont prises dans leur œuvre ;
Ô sort ! fatals nœuds !
Parce que l'ortie est une couleuvre,
L'araignée un gueux ;
Parce qu'elles ont l'ombre des abîmes,
Parce qu'on les fuit,
Parce qu'elles sont toutes deux victimes
De la sombre nuit.
Passants, faites grâce à la plante obscure,
Au pauvre animal.
Plaignez la laideur, plaignez la piqûre,
Oh ! plaignez le mal !
Il n'est rien qui n'ait sa mélancolie ;
Tout veut un baiser.
Dans leur fauve horreur, pour peu qu'on oublie
De les écraser,
Pour peu qu'on leur jette un œil moins superbe1,
Tout bas, loin du jour,
La mauvaise bête et la mauvaise herbe
Murmurent : Amour !
1 Ici : méprisant.
Quelle doit être la tonalité de la lettre ?
Texte A : Victor Hugo, "J'aime l'araignée", Les Contemplations, Livre III, "Les Luttes et les rêves", XXVII
1856
J'aime l'araignée et j'aime l'ortie,
Parce qu'on les hait ;
Et que rien n'exauce et que tout châtie
Leur morne souhait ;
Parce qu'elles sont maudites, chétives,
Noirs êtres rampants ;
Parce qu'elles sont les tristes captives
De leur guet-apens ;
Parce qu'elles sont prises dans leur œuvre ;
Ô sort ! fatals nœuds !
Parce que l'ortie est une couleuvre,
L'araignée un gueux ;
Parce qu'elles ont l'ombre des abîmes,
Parce qu'on les fuit,
Parce qu'elles sont toutes deux victimes
De la sombre nuit.
Passants, faites grâce à la plante obscure,
Au pauvre animal.
Plaignez la laideur, plaignez la piqûre,
Oh ! plaignez le mal !
Il n'est rien qui n'ait sa mélancolie ;
Tout veut un baiser.
Dans leur fauve horreur, pour peu qu'on oublie
De les écraser,
Pour peu qu'on leur jette un œil moins superbe1,
Tout bas, loin du jour,
La mauvaise bête et la mauvaise herbe
Murmurent : Amour !
1 Ici : méprisant.
- Il s'agit de rédiger une lettre. Il faut respecter la forme épistolaire. Le nom de l'auteur et du destinataire (Victor Hugo), la date et le lieu de rédaction doivent apparaître. Il faut qu'un "objet", le sujet de la lettre, soit explicité. Il faut également que des formules de politesse soient utilisées.
- Le lecteur ne connaît pas personnellement Victor Hugo. Le vouvoiement doit donc être utilisé.
- La lettre doit avoir une tonalité polémique. Le lecteur n'a pas aimé le poème.
- Le lecteur doit avoir des arguments et des exemples précis tirés du poème. On attend par exemple un lecteur qui pense que la beauté doit être le seul sujet d'inspiration de la poésie, qui remet en question la forme du poème, son message, etc.
- Le langage doit être courant ou soutenu, mais pas familier.
Louise Colet
7, allée des Lilas
75 006 Paris
Le 7 décembre 1856
Objet : Mécontentement
Monsieur Victor Hugo,
Je vous écris pour vous faire part de mon mécontentement. Je viens de lire votre poème "J'aime l'araignée", et quand bien même je vous admire et j'ai toujours aimé vos écrits, je suis bien étonnée que vous ayez pu écrire de telles inepties. C'est, avant même que je m'intéresse au sujet, la forme de votre poème qui m'a agacée. Si je comprends l'envie de toujours expérimenter la poésie, je dois vous dire que décasyllabes et pentasyllabes ne se marient pas du tout ensemble. Un vers noble, illustre, comme le décasyllabe, perd de sa grandeur quand il côtoie ce vers si rarement usité qu'est le pentasyllabe... Moitié moins de syllabes une fois sur l'autre ! Non, c'est un rythme cassé et bancal qui ne vous sied guère.
Mais je pardonnerais volontiers cette faute littéraire, car même les plus grands peuvent parfois se perdre, si la substance de votre poème n'était pas si offensante. Seulement, avoir choisi l'araignée et l'ortie pour sujets poétiques m'irrite. Je ne suis pas de ceux qui n'aiment et ne défendent que la poésie correspondant à des critères précis. Je peux comprendre qu'on s'inspire de la laideur. Je pense même qu'il faudrait le faire davantage. Rien sans doute n'est plus hautement poétique que de déceler la lumière dans l'obscurité, d'aller gratter la boue pour trouver de l'or, de rappeler que l'essentiel n'est jamais visible au premier abord.
Seulement, il me semble que vous commettez plusieurs fautes. D'une part, vous associez un animal à une plante. Quoi de commun entre l'araignée et l'ortie ? Rien. Jugées nuisibles, me répondrez-vous ? Hé ! Quoi ! N'avez-vous jamais été piqué par une ortie ? N'avez-vous jamais tremblé devant une araignée ? Mais enfin autrement, peut-on sérieusement les lier ? L'ortie est agaçante, l'araignée souvent considérée inquiétante, mais les comparer me paraît peu profitable et très mal inspiré.
Mais ce qui me gêne terriblement dans votre poème est que vous associez ces créatures aux hommes, et plus précisément aux "gueux". Un gueux, cher poète, n'est jamais un animal, n'est jamais une plante. C'est un homme, avec de profonds sentiments, avec un esprit, un passé, des souvenirs. Un gueux, c'est un homme bafoué, rejeté, car il est pauvre, car il est malheureux, car la chance jamais ne lui a souri et que les hommes autour de lui, loin de le soutenir, le foulent aux pieds. Et vous le comparez à une araignée ? Vous écrivez "victimes", "maudites", "tristes captives", "fatals nœuds"... Vous omettez presque le "guet-apens" que les araignées tissent pour emprisonner leurs proies qu'elles dévorent fort lentement ensuite ! Aimez une ortie et vous serez piqué. Aimez un gueux et vous serez récompensé.
Vous auriez pu, cher Victor Hugo, choisir un crapaud. Une limace. Un ver de terre. Ces êtres grossiers, visqueux, étranges, laids... mais inoffensifs. Des êtres qui ne tuent pas, qui ne piquent pas. Passe encore l'ortie, on se remet des démangeaisons qu'elle nous inflige, mais aviez-vous à l'esprit tous les insectes terriblement croqués par les araignées, lorsque vous avez écrit "murmurent : Amour" ? La poésie peut célébrer la laideur sans doute, mais doit-elle transformer de sombres meurtriers en pauvres victimes, en "chétives" créatures qu'il faut aimer ? Vous évoquez ce bel amour chrétien qui doit éveiller en l'Homme empathie et compassion pour celui qui souffre. J'aime les gueux, j'aime les mendiants, j'aime les femmes et les hommes rejetés par les autres et marqués par le sceau de la fatalité. Mais ceux qui tuent, ceux qui blessent, ceux qui toujours nous nuisent... Je n'en suis pas si sûre. Vous auriez pu toutefois écrire un poème sur cela. Peut-être m'auriez vous convaincue. Mais plutôt que de représenter fidèlement l'araignée dans toute sa noirceur meurtrière, vous avez essayé de me tromper en en faisant une victime à plaindre. Je pourrais peut-être verser des larmes sur un criminel, mais la poésie ne devrait jamais chercher à tromper son lecteur comme vous l'avez fait, cher Victor.
En espérant que vos prochains écrits sauront me faire aimer de nouveau vos vers,
Louise Colet