Le voyant chez Pasolini Exercice fondamental

Dans le film de Pasolini, la figure du voyant est rapprochée de celle de l'artiste.

Dans Œdipe roi, le voyant est Tirésias, qui est un devin aveugle. S'il ne peut voir le monde sensible, il a toutefois accès au savoir divin. Cette connaissance en fait un privilégié mais également un exilé. Dans le film, Pasolini le représente vêtu très pauvrement. Ses yeux sont d'un bleu très clair, inquiétant, qui en font un personnage énigmatique et plus qu'humain qui ne craint pas de révéler la vérité : c'est un être lié aux dieux. La première fois qu'il apparaît à l'écran, Tirésias joue de la flûte. Il semble d'ailleurs envoûter Œdipe, qui ne le quitte pas des yeux. Il apparaît comme un mirage, un être surnaturel. Dans l'un des premiers scénarios, Pasolini précisait d'ailleurs qu'il souhaitait qu'Œdipe pleure en écoutant la musique, mais finalement il repousse cette idée. Tirésias est celui qui a la connaissance, mais également celui qui touche les autres hommes et leur apprend la vérité.

Pasolini associe ces caractéristiques à l'artiste. En effet, il insiste sur le lien qui existe entre Tirésias et Œdipe, le devin assurant au roi qu'un jour il sera pareil à lui, pauvrement vêtu et joueur de flûte. C'est ce qui est montré dans l'épilogue du film. Œdipe est aveugle, il erre dans Rome en jouant de la musique. Comme Tirésias, il semble être devenu voyant malgré sa cécité : il a désormais accès à la connaissance. Pasolini rapproche le voyant de l'artiste dans le sens où, pour lui, l'artiste, comme le voyant, est rejeté par les hommes, incompris, parfois même persécuté. De même que le voyant, l'artiste sait quelque chose, voit quelque chose que les autres ne voient pas. Les dernières paroles d'Œdipe rappellent d'ailleurs que désormais il est voyant : "Ô lumière que je ne voyais plus, qui avant était en quelque sort mienne, maintenant tu m'éclaires pour la dernière fois. Je suis de retour. La vie finit où elle commence."