Les différentes formes de prise de parole au théâtre Exercice fondamental

Le théâtre est un art de la parole par laquelle l'action se structure et l'intrigue dramatique évolue. Dès la scène d'exposition, les éléments nécessaires à la compréhension de la pièce nous sont donnés par les répliques des personnages. Celles-ci peuvent être de différentes formes selon qu'on est dans le dialogue ou dans le monologue.

Tout d'abord, le théâtre est un échange de paroles entre les personnages présents sur scène : c'est le dialogue qui caractérise avant tout l'art dramatique. Le dialogue peut prendre plusieurs formes en fonction de la répartition des répliques, de leur rythme ou de leur fonction. La réplique en elle-même désigne la prise de parole du personnage : lorsqu'elle celle-ci est longue, on parle de tirade, à l'inverse de la répartie qui est une réplique courte où le personnage fait souvent la preuve de son esprit. Certains personnages monopolisent ainsi la parole sur scène et cette tentative de s'accaparer la parole est souvent significative, soit de l'importance du personnage, soit de son caractère : c'est le cas par exemple des personnages mégalomaniaques de Molière comme Arnolphe dans L'École des femmes ou Harpagon dans L'Avare. Un exemple emblématique de tirade est celle du nez par Cyrano de Bergerac dans la pièce d'Edmond Rostand : le personnage s'empare de la parole pour ridiculiser son adversaire tout en feignant de se moquer de lui-même. L'échange de répliques peut également être très rapide : les répliques sont courtes et on parle alors de stichomythie. L'effet provoqué est une accélération du rythme qui peut parfois être comique. La stichomythie est souvent utilisée dans la dispute, comme entre le Comte et Dom Diègue dans Le Cid de Corneille. Ces échanges théâtraux que sont les dialogues sur scène permettent au dramaturge de déployer l'intrigue, de faire avancer l'action. Ils sont souvent l'occasion pour le personnage de faire le récit de ce qui a eu lieu hors scène, soit par respect de la règle de bienséance, soit par manque de moyens pour le représenter sur scène : un personnage, qui peut être un messager, exposent aux autres les éléments nécessaires à la progression de l'intrigue. On a ainsi pu reprocher à Molière de trop user du récit dans L'École des femmes où Horace se confie souvent à Arnolphe sur les progrès de sa cour auprès d'Agnès.

Dans un second temps, l'autre forme emblématique du théâtre est le monologue, lorsque le personnage ne dialogue pas avec les autres. L'aparté peut ainsi être considéré comme une sorte de monologue : le personnage s'adresse alors au spectateur ou se parle à lui-même, à part du dialogue. Les autres personnages ne l'entendent pas. Cependant, le monologue est par définition le moment où le personnage est seul sur scène et soliloque : il s'agit d'un long discours que le personnage se tient à lui-même, seul sur scène, et qui n'est pas interrompu. Il représente de ce fait une pause dans l'action. Le personnage peut s'adresser à plusieurs instances : à lui-même tout d'abord, mais aussi à un personnage absent, au public, et parfois aux dieux, comme c'est souvent le cas dans la tragédie. Le monologue a plusieurs fonctions dans l'intrigue : il prend généralement une fonction introspective lorsqu'il présente les sentiments personnels du personnage qui fait le point sur un dilemme, un débat intérieur. Celle-ci peut s'assortir d'une fonction délibérative essentielle lorsque le personnage pèse le pour et le contre pour prendre une décision qui fera avancer l'intrigue. C'est par exemple le cas lors du monologue de Médée dans la pièce de Corneille : l'héroïne y réfléchit à sa vengeance. La décision qu'elle prend au terme de cette délibération seule sur scène représente donc un progrès dans l'histoire et, de ce point de vue, le monologue a souvent une fonction dramaturgique puisqu'il structure l'intrigue dramatique et prépare le spectateur à ce qui va suivre. Enfin, à la façon du récit dans le dialogue, le monologue a parfois une fonction descriptive lorsqu'il présente la situation passée d'un personnage, son parcours personnel ou les actions qui n'ont pas lieu sur scène. On apprend ainsi le vol de la cassette par le monologue d'Harpagon dans la comédie de Molière.