L'Organisation Mondiale de la Santé alerte sur le commerce illicite de médicaments contrefaits qui s'étend aujourd'hui à l'échelle mondiale. On peut citer l'exemple d'un sirop contre la toux dans lequel l'un des excipients, le glycérol, a été substitué par un antigel toxique, l'éthylène glycol.
Cet exercice propose d'étudier plusieurs techniques physico-chimiques susceptibles d'identifier des sirops contrefaits.
Données :
- Charge électrique élémentaire : e = 1{,}60×10^{-19} C
- Constante d'Avogadro : N_A = 6{,}02×10^{23} mol-1
- Propriétés physico-chimiques du glycérol et de l'éthylène glycol :
| Glycérol ou propane-1,2,3-triol | Éthylène glycol ou éthane-1,2-diol | |
|---|---|---|
| Formule brute | \ce{C3H8O3} | \ce{C2H6O2} |
| Formule semi-développée | \ce{HO-CH2-CH(OH)-CH2-OH} | \ce{HO-CH2-CH2-OH} |
| Caractéristiques diverses | Liquide transparent incolore, visqueux, non toxique, au goût sucré ; agent hydratant qui améliore l'onctuosité des préparations pharmaceutiques | Liquide transparent incolore, au goût sucré, toxique, pouvant être mortel à l'ingestion |
| Masse molaire (g.mol-1) | 92,1 | 62,1 |
| Masse volumique à 25°C (g.cm-3) | 1,3 | 1,1 |
| Température de fusion à la pression atmosphérique (°C) | 17,8 | -13,7 |
| Température d'ébullition à la pression atmosphérique (°C) | 290 | 197 |
| Indice de réfraction à 589,3 nm à 25°C | 1,47 | 1,44 |
À quelle famille de composés organiques appartiennent le glycérol et l'éthylène glycol ?
Les molécules de glycérol et d'éthylène glycol appartiennent à la famille des alcools, car elles possèdent le groupe hydroxyle \ce{OH}.
Quelles sont les deux caractéristiques communes au glycérol et à l'éthylène glycol qui rendent possible la contrefaçon d'un sirop ?
La contrefaçon d'un sirop au glycérol par de l'éthylène glycol est possible, car ce sont deux liquides transparents, incolores et au goût sucré, et ils possèdent des indices de réfraction très proches.
Comment peut-on expliquer la grande différence de température d'ébullition de ces deux molécules ?
Le glycérol a trois groupes hydroxyle, alors que l'éthylène glycol n'en a que deux. Le groupe hydroxyle entraîne l'existence de liaisons hydrogène intermoléculaires à l'état liquide. Plus le nombre de groupes hydroxyle augmente, plus les molécules sont liées entre elles et plus il faut apporter d'énergie pour passer de l'état liquide à l'état gazeux, ce qui augmente la température d'ébullition.
Quelles sont les deux techniques expérimentales non spectroscopiques qui permettraient de distinguer le glycérol de l'éthylène glycol ?
Les deux techniques expérimentales non spectroscopiques permettant de distinguer le glycérol de l'éthylène glycol sont :
- Mesurer la température de fusion / solidification : on place des échantillons dans un réfrigérateur (entre 5 et 15 °C), le glycérol va se solidifier tandis que l'éthylène glycol restera liquide.
- Mesurer la température d'ébullition : on chauffe l'échantillon et on mesure la température à laquelle il se vaporise, elle sera plus élevée pour le glycérol.
Spectroscopie infrarouge
Quelle information sur une molécule un spectre infrarouge permet-il d'obtenir ?
Un spectre infrarouge renseigne sur la nature des liaisons présentes dans une molécule et permet d'en déduire les groupes caractéristiques qu'elle possède.
La spectroscopie infrarouge est-elle une technique pertinente pour repérer un sirop contrefait à l'éthylène glycol ?
La spectroscopie infrarouge n'est pas une technique appropriée pour repérer un sirop contrefait à l'éthylène glycol car le glycérol et l'éthylène glycol possèdent le même type de liaisons.
Spectroscopie de RMN du proton

Figure 1 : Spectre de RMN du proton
D'après http://sdbs.db.aist.go.jp (national institute of advanced industrial science and technology)
La spectroscopie de RMN du proton permet-elle de distinguer le glycérol de l'éthylène glycol ?
La spectroscopie de RMN du proton permet de distinguer le glycérol de l'éthylène glycol, car ces 2 molécules ne possèdent pas la même structure (les environnements des groupes de protons sont différents).
Le spectre de la figure 1 est-il celui du glycérol ou celui de l'éthylène glycol ?
- La molécule de glycérol possède 4 groupes de protons équivalents et son spectre de RMN comporte donc 4 signaux.
- La molécule d'éthylène glycol qui ne possède que 2 groupes de protons équivalents et son spectre de RMN comporte donc 2 signaux.
Le spectre donné possède 2 signaux, ce spectre correspond donc à celui de l'éthylène glycol.
La spectroscopie de RMN du proton est une méthode adaptée pour connaître la structure d'un composé pur ; elle est par contre mal adaptée pour analyser les constituants d'un mélange contenant un grand nombre d'espèces chimiques et reconnaître ainsi un sirop contrefait.
Comment peut-on justifier cette affirmation ?
Les signaux RMN des différentes molécules présentes dans le sirop se superposent et ne peuvent être associés à une molécule unique. Le spectre résultant ne sera pas interprétable.
Spectrométrie de masse à temps de vol
Le spectromètre à temps de vol est un dispositif permettant d'analyser les constituants d'un mélange. Une petite quantité du mélange liquide à analyser est injectée dans une enceinte où règne un vide poussé appelée chambre d'ionisation (figure 2). Le liquide se vaporise et les molécules présentes dans le gaz sont ionisées de sorte qu'elles se retrouvent sous forme d'ions mono-chargés de charge q = e. Ces ions pénètrent dans la chambre d'accélération où ils acquièrent une vitesse v sous l'action d'un champ électrique uniforme. Les ions les plus légers acquièrent une vitesse plus grande que les ions les plus lourds. Les ions parcourent ensuite une distance d connue, dans une zone où ne règne pas de champ électrique (tube de vol). Un détecteur à la sortie du tube de vol permet de mesurer le temps de vol \Delta t, durée nécessaire aux ions pour parcourir la distance d. La mesure des temps de vol caractéristiques de chaque ion permet d'identifier les différents constituants d'un mélange.

Figure 2 : Schéma de principe du spectromètre à temps de vol
Accélération des ions
La chambre d'accélération est constituée de deux plaques métalliques parallèles positionnées en A et B (figure 2). Une tension UAB positive est appliquée entre ces deux plaques, produisant un champ électrique uniforme \overrightarrow{E}.
On pourra négliger l'influence du poids des ions dans la chambre d'accélération.
Pourquoi les molécules constituant le mélange doivent-elles être ionisées à l'entrée de la chambre d'accélération ?
Les molécules étant électriquement neutres, il est nécessaire de les ioniser pour qu'elles soient sensibles au champ électrique et subissent la force électrique pour les accélérer.
Un ion, de charge électrique q = e et de masse m se déplace dans la chambre d'accélération entre les deux plaques. L'effet du champ électrique \overrightarrow{E} est tel que la variation d'énergie cinétique de l'ion entre les deux plaques A et B est égale au travail de la force électrique s'exerçant sur lui entre A et B :
E_C\left(B\right) – E_C\left(A\right) = W_{AB}\left(\overrightarrow{F}\right)
La relation entre le champ électrique \overrightarrow{E} et la tension électrique UAB dans le dispositif est donnée par l'expression :
\overrightarrow{E}.\overrightarrow{AB} = U_{AB}
On étudie le mouvement de l'ion dans le référentiel du laboratoire supposé galiléen.
En faisant l'hypothèse que la vitesse initiale de l'ion est nulle au point A, comment peut-on montrer que l'expression de la vitesse vB de l'ion en B est : v_B = \sqrt{\dfrac{2eU_{AB}}{m}} ?
D'après les données, la variation d'énergie cinétique de la particule entre les plaques A et B est :
E_C\left(B\right) – E_C\left(A\right) = W_{AB}\left(\overrightarrow{F}\right)
L'énergie cinétique au niveau de la plaque A est nulle, car sa vitesse est nulle, d'où :
E_C\left(A\right) = 0 J
On en déduit :
E_C\left(B\right) = W_{AB}\left(\overrightarrow{F}\right)
Or, l'expression du travail de la force électrique est :
W_{AB}\left(\overrightarrow{F}\right) = \overrightarrow{F} \times \overrightarrow{AB} =q \times \overrightarrow{E}\times \overrightarrow{AB}
D'après l'énoncé, on a :
\overrightarrow{E}.\overrightarrow{AB} = U_{AB}
Soit :
W_{AB}\left(\overrightarrow{F}\right)=q \times U_{AB}
Ici, la charge de l'ion est : q = e
On a alors :
W_{AB}\left(\overrightarrow{F}\right)=e \times U_{AB}
Soit :
E_C\left(B\right) =e \times U_{AB}
Or, la relation liant l'énergie cinétique de la particule à sa vitesse est :
E_C =\dfrac{1}{2} \times m \times v^{2}
On a finalement :
\dfrac{1}{2} \times m \times v_{B}^{2}=e \times U_{AB}
Soit :
v_{B}^{2}= \dfrac{2 \times e \times U_{AB}}{m}
Et donc :
v_{B}= \sqrt{ \dfrac{2 \times e \times U_{AB}}{m}}
v_{B}= \sqrt{ \dfrac{2 \times e \times U_{AB}}{m}}
Que peut-on en déduire sur l'influence de la masse de l'ion sur la valeur de sa vitesse ?
Dans la relation de la vitesse démontrée dans la question précédente, la vitesse est inversement proportionnelle à la racine carrée de la masse m, donc plus la particule a une masse importante et plus sa vitesse sera faible.
Quelle phrase du texte d'introduction sur le spectromètre à temps de vol vérifie cette déduction ?
L'influence de la masse de l'ion sur sa vitesse est donc cohérente avec la phrase : "Les ions les plus légers acquièrent une vitesse plus grande que les ions les plus lourds".
Parcours dans le tube de vol
L'ion pénètre dans le tube de vol de longueur d = 1{,}50 m avec la vitesse vB précédente dont l'ordre de grandeur est un million de km.h-1. On peut considérer le mouvement de l'ion dans le tube de vol comme rectiligne uniforme.
Quelle est la relation liant la vitesse de l'ion au point B et la durée de son trajet dans le tube de vol ?
L'expression de la vitesse de l'ion au point B et la durée de son trajet dans le tube de vol est :
v = \dfrac{d}{\Delta t}
Par déduction, quelle est la relation liant la masse de l'ion et la durée de son parcours dans le tube de vol ?
La relation liant la vitesse vB de l'ion en B à sa masse est :
v_{B}= \sqrt{ \dfrac{2 \times e \times U_{AB}}{m}}
On peut en déduire l'expression de la masse m :
m= 2 \times e \times U_{AB} \times \dfrac{1}{v_{B}^{2} }
Sachant que la vitesse de l'ion est constante, on peut écrire :
v = v_{B} = \dfrac{d}{\Delta t}
Soit :
m= 2 \times e \times U_{AB} \times \left(\dfrac{\Delta t}{d } \right)^{2}
Le spectromètre à temps de vol est réglé avec les paramètres suivants : U_{AB} = 25{,}0 kV ; d = 1{,}50 m. On introduit un échantillon pur dans la chambre d'ionisation. Le temps de vol mesuré est : \Delta t = 6{,}56 \mu s.
Quel est le calcul correct de la masse de l'échantillon ?
Calcul de la masse m :
m= 2 \times e \times U_{AB} \times \left(\dfrac{\Delta t}{d } \right)^{2}
m= 2 \times 1{,}60 \times 10^{-19} \times 25{,}0 \times 10^{3} \times \left(\dfrac{6{,}56 \times 10^{-6} }{1{,}50 } \right)^{2}
m = 1{,}53 \times 10^{-25} kg
m = 1{,}53 \times 10^{-25}
Quelle est la relation correcte liant les masses de la molécule et celle de l'ion formé ?
Il s'agit de la masse d'un ion qui correspond à une molécule ayant perdu un électron : on peut donc écrire : m_{ion} \approx m_{molécule}
m_{ion} \approx m_{molécule}
Quel est le calcul correct de la masse molaire de l'espèce chimique composant l'échantillon ?
Pour déterminer la masse molaire correspondante, il faut multiplier la masse d'une molécule par la constante d'Avogadro :
M = m \times N_{A}
M = 1{,}53 \times 10^{-25} \times 6{,}02 \times 10^{23}
M = 9{,}2 \times 10^{-2} kg.mol-1
Soit :
M = 92 g.mol-1
M = 92 g.mol-1
Ce sirop est-il une contrefaçon ?
Ce sirop n'est pas une contrefaçon, car la masse molaire déterminée correspond bien à celle du glycérol.