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Attendez-vous d'un roman qu'il vous plonge dans les pensées d'un personnage ? Dissertation type bac

Ce contenu a été rédigé par l'équipe éditoriale de Kartable.

Dernière modification : 24/10/2018 - Conforme au programme 2018-2019

Métropole, 2014, voie L

Vous répondrez à cette question en vous fondant sur les textes du corpus ainsi que sur les textes et les œuvres que vous avez lus et étudiés.

Attendez-vous essentiellement d'un roman qu'il vous plonge dans les pensées d'un personnage ?

Document 1

Texte A : Stendhal, La Chartreuse de Parme, partie II, chapitre 18, extrait

1839

La Chartreuse de Parme raconte l'itinéraire d'un jeune aristocrate italien, Fabrice Del Dongo. Victime d'une vengeance, le personnage est emprisonné dans la citadelle de Parme. Le gouverneur de cette forteresse est le général Fabio Conti, que Fabrice avait croisé avec sa fille Clélia sept années plus tôt. Fabrice vient de revoir la jeune fille.

Il courut aux fenêtres ; la vue qu'on avait de ces fenêtres grillées était sublime : un seul petit coin de l'horizon était caché, vers le nord-ouest, par le toit en galerie du joli palais du gouverneur, qui n'avait que deux étages ; le rez-de-chaussée était occupé par les bureaux de l'état-major ; et d'abord les yeux de Fabrice furent attirés vers une des fenêtres du second étage, où se trouvaient, dans de jolies cages, une grande quantité d'oiseaux de toute sorte.
Fabrice s'amusait à les entendre chanter, et à les voir saluer les derniers rayons du crépuscule du soir, tandis que les geôliers1 s'agitaient autour de lui. Cette fenêtre de la volière n'était pas à plus de vingt-cinq pieds de l'une des siennes, et se trouvait à cinq ou six pieds en contrebas, de façon qu'il plongeait sur les oiseaux.
Il y avait lune ce jour-là, et au moment où Fabrice entrait dans sa prison, elle se levait majestueusement à l'horizon à droite, au-dessus de la chaîne des Alpes, vers Trévise. Il n'était que huit heures et demie du soir, et à l'autre extrémité de l'horizon, au couchant, un brillant crépuscule rouge orangé dessinait parfaitement les contours du mont Viso et des autres pics des Alpes qui remontent de Nice vers le Mont-Cenis et Turin : sans songer autrement à son malheur, Fabrice fut ému et ravi par ce spectacle sublime. "C'est donc dans ce monde ravissant que vit Clélia Conti ! avec son âme pensive et sérieuse, elle doit jouir de cette vue plus qu'un autre ; on est ici comme dans des montagnes solitaires à cent lieues de Parme." Ce ne fut qu'après avoir passé plus de deux heures à la fenêtre, admirant cet horizon qui parlait à son âme, et souvent aussi arrêtant sa vue sur le joli palais du gouverneur que Fabrice s'écria tout à coup : "Mais ceci est-il une prison ? est-ce là ce que j'ai tant redouté ?" Au lieu d'apercevoir à chaque pas des désagréments et des motifs d'aigreur, notre héros se laissait charmer par les douceurs de la prison.

1 geôliers : gardiens de la prison

Document 2

Texte B : Gustave Flaubert, Madame Bovary, partie II, chapitre 6, extrait

1857

Emma a épousé Charles Bovary, un officier de santé. Elle mène une vie plate et médiocre, bien différente du bonheur que lui faisaient imaginer ses lectures romanesques au couvent où elle a fait ses études. Elle sombre peu à peu dans l'ennui et la mélancolie.

Un soir que la fenêtre était ouverte, et que, assise au bord, elle venait de regarder Lestiboudois, le bedeau1, qui taillait le buis, elle entendit tout à coup sonner l'Angelus2.
On était au commencement d'avril, quand les primevères sont écloses ; un vent tiède se roule sur les plates-bandes labourées, et les jardins, comme des femmes, semblent faire leur toilette pour les fêtes de l'été. Par les barreaux de la tonnelle et au-delà tout alentour, on voyait la rivière dans la prairie, où elle dessinait sur l'herbe des sinuosités vagabondes. La vapeur du soir passait entre les peupliers sans feuilles, estompant leurs contours d'une teinte violette, plus pâle et plus transparente qu'une gaze subtile arrêtée sur leurs branchages. Au loin, des bestiaux marchaient ; on n'entendait ni leurs pas, ni leurs mugissements ; et la cloche, sonnant toujours, continuait dans les airs sa lamentation pacifique.
À ce tintement répété, la pensée de la jeune femme s'égarait dans ses vieux souvenirs de jeunesse et de pension. Elle se rappela les grands chandeliers, qui dépassaient sur l'autel les vases pleins de fleurs et le tabernacle3 a colonnettes. Elle aurait voulu, comme autrefois, être encore confondue dans la longue ligne des voiles blancs, que marquaient de noir ça et là les capuchons raides des bonnes sœurs inclinées sur leur prie-Dieu ; le dimanche, à la messe, quand elle relevait sa tête, elle apercevait le doux visage de la Vierge parmi les tourbillons bleuâtres de l'encens qui montait. Alors un attendrissement la saisit ; elle se sentit molle et tout abandonnée, comme un duvet d'oiseau qui tournoie dans la tempête ; et ce fut sans en avoir conscience qu'elle s'achemina vers l'église, disposée à n'importe quelle dévotion, pourvu qu'elle y absorbât son âme et que l'existence entière y disparût.

1 bedeau : employé d'une église préposé au service matériel
2 Angelus : sonnerie de cloche qui annonce l'heure de la prière
3 tabernacle : petite armoire qui renferme les hosties

Document 3

Texte C : Émile Zola, L'Assommoir, chapitre 1, extrait

1876

Gervaise Macquart, une jeune provinciale, a suivi Lantier, son amant, à Paris. Vers cinq heures du matin, tandis que ses deux enfants dorment paisiblement, Gervaise, accoudée à la fenêtre de sa chambre d'hôtel, s'inquiète de l'absence de Lantier qui n'est pas rentré de la nuit.

L'hôtel se trouvait sur le boulevard de la Chapelle1, à gauche de la barrière Poissonnière. C'était une masure2 de deux étages, peinte en rouge lie de vin jusqu'au second, avec des persiennes pourries par la pluie. Au-dessus d'une lanterne aux vitres étoilées, on parvenait à lire, entre les deux fenêtres : Hôtel Boncœur, tenu par Marsoullier, en grandes lettres jaunes, dont la moisissure du plâtre avait emporté des morceaux. Gervaise, que la lanterne gênait, se haussait, son mouchoir sur les lèvres. Elle regardait à droite, du côté du boulevard de Rochechouart, où des groupes de bouchers, devant les abattoirs, stationnaient en tabliers sanglants ; et le vent frais apportait une puanteur par moments, une odeur fauve de bêtes massacrées. Elle regardait à gauche, enfilant un long ruban d'avenue, s'arrêtant, presque en face d'elle, à la masse blanche de l'hôpital de Lariboisière, alors en construction.
Lentement, d'un bout à l'autre de l'horizon, elle suivait le mur de l'octroi3, derrière lequel, la nuit, elle entendait parfois des cris d'assassinés ; et elle fouillait les angles écartés, les coins sombres, noirs d'humidité et d'ordure, avec la peur d'y découvrir le corps de Lantier, le ventre troué de coups de couteau. Quand elle levait les yeux, au-delà de cette muraille grise et interminable qui entourait la ville d'une bande de désert, elle apercevait une grande lueur, une poussière de soleil, pleine déjà du grondement matinal de Paris. Mais c'était toujours à la barrière Poissonnière qu'elle revenait, le cou tendu, s'étourdissant à voir couler, entre les deux pavillons trapus de l'octroi, le flot ininterrompu d'hommes, de bêtes, de charrettes, qui descendait des hauteurs de Montmartre et de la Chapelle. Il y avait là un piétinement de troupeau, une foule que de brusques arrêts étalaient en mares sur la chaussée, un défilé sans fin d'ouvriers allant au travail, leurs outils sur le dos, leur pain sous le bras ; et la cohue s'engouffrait dans Paris où elle se noyait, continuellement. Lorsque Gervaise, parmi tout ce monde, croyait reconnaître Lantier, elle se penchait davantage, au risque de tomber ; puis, elle appuyait plus fortement son mouchoir sur la bouche, comme pour renfoncer sa douleur.

1 La Chapelle : quartier misérable du Paris du XIXe siècle
2 masure : petite habitation délabrée
3 octroi : lieu où est perçue une taxe

Document 4

Texte D : Marcel Proust, À l'ombre des jeunes filles en fleurs, "Noms de pays : le pays", extrait

1919

L'action se déroule en Normandie. Le narrateur prend le train pour aller visiter l'église de Balbec.

Les levers de soleil sont un accompagnement des longs voyages en chemin de fer, comme les œufs durs, les journaux illustrés, les jeux de cartes, les rivières où des barques s'évertuent sans avancer. À un moment où je dénombrais les pensées qui avaient rempli mon esprit, pendant les minutes précédentes, pour me rendre compte si je venais ou non de dormir (et où l'incertitude même qui me faisait me poser la question, était en train de me fournir une réponse affirmative), dans le carreau de la fenêtre, au-dessus d'un petit bois noir, je vis des nuages échancrés1 dont le doux duvet était d'un rose fixé, mort, qui ne changera plus, comme celui qui teint les plumes de l'aile qui l'a assimilé ou le pastel sur lequel l'a déposé la fantaisie du peintre. Mais je sentais qu'au contraire cette couleur n'était ni inertie, ni caprice, mais nécessité et vie. Bientôt s'amoncelèrent derrière elle des réserves de lumière. Elle s'aviva, le ciel devint d'un incarnat2 que je tâchais, en collant mes yeux à la vitre, de mieux voir car je le sentais en rapport avec l'existence profonde de la nature, mais la ligne du chemin de fer ayant changé de direction, le train tourna, la scène matinale fut remplacée dans le cadre de la fenêtre par un village nocturne aux toits bleus de clair de lune, avec un lavoir encrassé de la nacre opaline3 de la nuit, sous un ciel encore semé de toutes ses étoiles, et je me désolais d'avoir perdu ma bande de ciel rose quand je l'aperçus de nouveau, mais rouge cette fois, dans la fenêtre d'en face qu'elle abandonna à un deuxième coude de la voie ferrée ; si bien que je passais mon temps à courir d'une fenêtre à l'autre pour rapprocher, pour rentoiler4 les fragments intermittents et opposites de mon beau matin écarlate et versatile5 et en avoir une vue totale et un tableau continu.

1 échancré : creusé
2 incarnat : rouge clair
3 opalin : qui est d'une teinte laiteuse et bleuâtre
4rentoiler : remettre une toile neuve à la place de celle qui a été usée
5 versatile : sujet à de brusques revirements

Dans cet extrait, qui parle ?

Texte D : Marcel Proust, À l'ombre des jeunes filles en fleur, "Noms de pays : le pays", extrait

1919

L'action se déroule en Normandie. Le narrateur prend le train pour aller visiter l'église de Balbec.

Les levers de soleil sont un accompagnement des longs voyages en chemin de fer, comme les œufs durs, les journaux illustrés, les jeux de cartes, les rivières où des barques s'évertuent sans avancer. À un moment où je dénombrais les pensées qui avaient rempli mon esprit, pendant les minutes précédentes, pour me rendre compte si je venais ou non de dormir (et où l'incertitude même qui me faisait me poser la question, était en train de me fournir une réponse affirmative), dans le carreau de la fenêtre, au-dessus d'un petit bois noir, je vis des nuages échancrés1 dont le doux duvet était d'un rose fixé, mort, qui ne changera plus, comme celui qui teint les plumes de l'aile qui l'a assimilé ou le pastel sur lequel l'a déposé la fantaisie du peintre. Mais je sentais qu'au contraire cette couleur n'était ni inertie, ni caprice, mais nécessité et vie. Bientôt s'amoncelèrent derrière elle des réserves de lumière. Elle s'aviva, le ciel devint d'un incarnat2 que je tâchais, en collant mes yeux à la vitre, de mieux voir car je le sentais en rapport avec l'existence profonde de la nature, mais la ligne du chemin de fer ayant changé de direction, le train tourna, la scène matinale fut remplacée dans le cadre de la fenêtre par un village nocturne aux toits bleus de clair de lune, avec un lavoir encrassé de la nacre opaline3 de la nuit, sous un ciel encore semé de toutes ses étoiles, et je me désolais d'avoir perdu ma bande de ciel rose quand je l'aperçus de nouveau, mais rouge cette fois, dans la fenêtre d'en face qu'elle abandonna à un deuxième coude de la voie ferrée ; si bien que je passais mon temps à courir d'une fenêtre à l'autre pour rapprocher, pour rentoiler4 les fragments intermittents et opposites de mon beau matin écarlate et versatile5 et en avoir une vue totale et un tableau continu.

1 échancré : creusé
2 incarnat : rouge clair
3 opalin : qui est d'une teinte laiteuse et bleuâtre
4rentoiler : remettre une toile neuve à la place de celle qui a été usée
5 versatile : sujet à de brusques revirements

À travers les yeux de qui Flaubert raconte-t-il cette scène ?

Texte B : Gustave Flaubert, Madame Bovary, partie II, chapitre 6, extrait

1857

Emma a épousé Charles Bovary, un officier de santé. Elle mène une vie plate et médiocre, bien différente du bonheur que lui faisaient imaginer ses lectures romanesques au couvent où elle a fait ses études. Elle sombre peu à peu dans l'ennui et la mélancolie.

Un soir que la fenêtre était ouverte, et que, assise au bord, elle venait de regarder Lestiboudois, le bedeau1, qui taillait le buis, elle entendit tout à coup sonner l'Angelus2.
On était au commencement d'avril, quand les primevères sont écloses ; un vent tiède se roule sur les plates-bandes labourées, et les jardins, comme des femmes, semblent faire leur toilette pour les fêtes de l'été. Par les barreaux de la tonnelle et au-delà tout alentour, on voyait la rivière dans la prairie, où elle dessinait sur l'herbe des sinuosités vagabondes. La vapeur du soir passait entre les peupliers sans feuilles, estompant leurs contours d'une teinte violette, plus pâle et plus transparente qu'une gaze subtile arrêtée sur leurs branchages. Au loin, des bestiaux marchaient ; on n'entendait ni leurs pas, ni leurs mugissements ; et la cloche, sonnant toujours, continuait dans les airs sa lamentation pacifique.
À ce tintement répété, la pensée de la jeune femme s'égarait dans ses vieux souvenirs de jeunesse et de pension. Elle se rappela les grands chandeliers, qui dépassaient sur l'autel les vases pleins de fleurs et le tabernacle3 a colonnettes. Elle aurait voulu, comme autrefois, être encore confondue dans la longue ligne des voiles blancs, que marquaient de noir ça et là les capuchons raides des bonnes sœurs inclinées sur leur prie-Dieu ; le dimanche, à la messe, quand elle relevait sa tête, elle apercevait le doux visage de la Vierge parmi les tourbillons bleuâtres de l'encens qui montait. Alors un attendrissement la saisit ; elle se sentit molle et tout abandonnée, comme un duvet d'oiseau qui tournoie dans la tempête ; et ce fut sans en avoir conscience qu'elle s'achemina vers l'église, disposée à n'importe quelle dévotion, pourvu qu'elle y absorbât son âme et que l'existence entière y disparût.

1 bedeau : employé d'une église préposé au service matériel
2 Angelus : sonnerie de cloche qui annonce l'heure de la prière
3 tabernacle : petite armoire qui renferme les hosties

Qu'est-ce que la focalisation interne ?

Parmi les propositions suivantes, quelles phrases correspondent à une focalisation interne ?

Quelle définition correspond à la focalisation externe ?

Quelle focalisation est utilisée dans le roman épistolaire ?

Le XVIIe siècle est une période où les écrivains privilégient les analyses psychologiques de leurs personnages, plongeant le lecteur dans les pensées du héros. La Princesse de Clèves de Madame de Lafayette est un des premiers romans qui permet de s'intéresser à ce qui se passe dans la tête de l'héroïne, et ce dès le XVIe siècle. Toutefois, le succès des romans épistolaires au XVIIe, puis l'avènement du réalisme et du naturalisme au XIXe siècle, ont fait de la plongée dans les pensées du personnage un outil répandu dans la littérature.
Cela signifie que la littérature qui précède cette époque ne donnait pas nécessairement au lecteur l'accès aux pensées d'un personnage. Pour autant, est-elle plus "faible" ? Par ailleurs, l'arrivée du Nouveau Roman a redéfini les règles de psychologie du personnage, et mis en place une atmosphère de mystère qui ne va pas avec une plongée dans l'intime du héros.
On peut dès lors se demander s'il est nécessaire pour l'auteur de plonger le lecteur dans l'esprit d'un personnage ? Lorsqu'il le fait, est-ce la seule chose qui pousse à lire ?
Pour répondre à cette question il convient de s'intéresser d'abord à ce qu'apporte au lecteur la possibilité de savoir ce que pense le personnage. Ensuite, il faudra préciser les autres attraits de la lecture. Enfin, il sera analysé comment le roman permet une plongée dans les pensées de l'auteur.

I

Le roman pour découvrir les pensées du personnage

A

La supériorité de la fiction sur la réalité

  • Dans la réalité, il est impossible de savoir ce que pensent les autres. L'être humain est voué à ne savoir qu'une chose : ce qu'il pense lui-même.
  • Le besoin de savoir ce que l'autre pense, ressent, est néanmoins présent. La littérature offre cela au lecteur. Elle lui permet de combler cette frustration. C'est bien ce que dit Marcel Proust : "La trouvaille du romancier a été d'avoir l'idée de remplacer ces parties impénétrables à l'âme par une quantité égale de parties immatérielles, c'est-à-dire que notre âme peut s'assimiler ."
  • Dévoiler les pensées du personnage permet de mieux faire comprendre ses réactions. Le lecteur a alors la possibilité de découvrir les émotions et les sentiments intimes du héros. Ainsi, dans La Princesse de Clèves, le lecteur comprend pourquoi la princesse lutte contre sa passion pour Nemours car sait à quel point la vertu et la sincérité sont importantes pour elle.
B

Les outils d'une plongée dans l'intimité

  • Plusieurs outils s'offrent à l'écrivain qui veut plonger le lecteur dans les pensées d'un personnage. On peut déjà écrire à la première personne du singulier. Ainsi, le lecteur est mis à la place du personnage. Le personnage et le narrateur ne font qu'un. C'est le cas de Meursault dans L'Étranger de Camus.
  • Dans les romans autobiographiques, le lecteur est plongé dans les pensées du personnage. Cela permet de se sentir plus proche de lui. C'est ce qu'on trouve dans Mémoires d'Outre-tombe de Chateaubriand.
  • Les romans épistolaires permettent de révéler les désirs et sentiments des personnages, mais aussi de voir comment ils peuvent mentir ou manipuler. On peut citer La Nouvelle Héloïse de Rousseau dans lequel les lettres permettent de révéler l'amour entre Julie et le héros.
  • Une technique naît à la fin du XIXe siècle, avec le poète Édouard Dujardin. C'est la technique du "flux de conscience", "stream of consciousness". Les auteurs anglo-saxons sont les maîtres en la matière, comme Virginia Woolf avec Mrs Dalloway, mais Proust dans À la recherche du temps perdu utilise aussi cette technique.
  • L'auteur peut plonger le lecteur dans les pensées du personnage en utilisant le point de vue omniscient. Il permet non seulement de dévoiler l'intime du héros mais aussi de l'analyser. C'est ce que fait Gustave Flaubert par exemple dans L'Éducation sentimentale.
C

L'identification au personnage

  • Le lecteur se sent plus proche du personnage et il a plus d'empathie car il peut mieux le comprendre : il s'identifie alors plus facilement et ressent ses émotions. Il trouve sa situation plus touchante ou terrible, comme dans Le Dernier Jour d'un condamné de Victor Hugo, qui permet au lecteur de se mettre véritablement à la place d'un homme condamné à mort.
  • Le lecteur peut revivre des émotions qu'il a vécues, se rappeler par exemple son premier amour en lisant Premier amour de Tourgueniev ou affronter le deuil et la mort en se plongeant dans La Guerre et la Paix de Tolstoï.
  • Le lecteur peut aussi découvrir de nouvelles émotions ou sensations, essayer de comprendre l'impensable. C'est le cas s'il se plonge dans les pensées d'un assassin comme dans Crime et Châtiment de Dostoïevski, ou encore s'il lit Lolita dont le personnage principal est un pédophile.

Cependant, la plongée dans les pensées d'un personnage est loin d'être l'unique fonction du roman.

II

Les autres fonctions du roman

A

Le rejet de la psychologie du personnage

  • L'écrivain peut faire le choix de ne révéler aucune pensée de ses personnages. On se retrouve alors avec un roman plus mystérieux et intriguant. Le but est d'intéresser le lecteur à autre chose que la psychologie. C'est notamment le cas des personnages dans le Nouveau Roman.
  • La focalisation externe ne donne aucune indication sur l'intimité du personnage, comme dans l'incipit de Bouvard et Pécuchet de Gustave Flaubert. Le lecteur ne voit que ce qui se passe de l'extérieur. Il est spectateur.
  • Les romanciers du Nouveau Roman, comme Nathalie Sarraute, rejette la psychologie du personnage et privilégie les questionnements humains ou ce qu'on appelle "le style littéraire".
B

L'importance de l'intrigue

  • L'action est très importante aussi dans le roman. Dans certains genres, elle prévaut même sur les personnages. Par exemple, dans les romans d'aventures, les péripéties sont plus intéressantes que la psychologie des personnages. Le lecteur suit avec plaisir D'Artagnan bien que sa personnalité ne soit pas très approfondie.
  • Le roman permet de faire découvrir au lecteur une autre époque. Il peut être un témoignage. Ainsi, le roman historique plonge le lecteur dans un passé qu'il ne connaît pas bien, comme Notre-Dame de Paris de Victor Hugo. Après sa mort, il peut également devenir un témoin de son temps. Ainsi, Stendhal a représenté la deuxième République dans L'Éducation sentimentale.
  • Le roman permet enfin de faire rêver, de peindre un univers enchanté ou étrange, qui n'existe pas. C'est le cas des romans de science-fiction ou de fantaisie : on peut citer Jules Verne ou Tolkien.
C

La dénonciation des injustices et problèmes de la société

  • Un autre intérêt du roman est qu'il permet de convaincre le lecteur. Il peut donc servir à dénoncer. Zola dans Germinal condamne la vie misérable des mineurs. Il veut faire changer les choses. Le roman permet de révéler les injustices et de les dénoncer.
  • Le roman permet de plonger le lecteur dans une forme de réalisme afin de le faire réfléchir aux conditions de vie de son temps. Émile Zola veut ainsi faire découvrir au lecteur la misère humaine et l'hérédité des tares familiales dans sa saga les Rougon-Macquart.
  • Le roman permet de poser des questions. Victor Hugo dans Le Dernier Jour d'un condamné remet en question la peine de mort en se posant la question de sa légitimité.
  • Le roman est aussi le lieu pour débattre de questions sur la condition humaine. Des auteurs comme Léon Tolstoï ou Fiodor Dostoïevski explorent l'âme humaine et traitent de la quête de sens de l'Homme.

On peut aussi se demander si le roman n'est pas un moyen extraordinaire de plonger dans l'esprit d'un créateur.

III

Le roman, un regard particulier sur le monde pour développer l'esprit critique

A

Un regard particulier sur le monde

  • Les personnages de roman permettent de jeter un regard particulier sur le monde. Ils sont souvent utilisés par l'écrivain pour développer certaines de leurs idées, mais il faut faire attention de ne pas mélanger personnage et auteur. Ainsi, le héros Humbert Humbert dans Lolita de Nabokov n'est pas un double de l'écrivain. Pareillement, Meursault dans L'Étranger sert à Camus à développer ses idées sur l'absurde, à entrer dans la tête d'un homme qui ne semble plus avoir d'émotions, mais il n'est pas Camus.
  • Le personnage peut être un porte-parole de l'auteur. Il peut l'utiliser pour dénoncer quelque chose, pour dire, pour s'exprimer. Parfois, auteur et narrateur se confondent. C'est par exemple le cas avec Bardamu, qui est un double littéraire de Céline, et qui apparaît aussi bien dans Voyage au bout de la nuit que dans Mort à crédit.
  • Certains personnages sont là pour défendre les idées de l'auteur. Par exemple, dans L'Œuvre de Zola, l'écrivain est un personnage très positif, l'un des rares à ne pas être moqué, et il représente Zola. Il symbolise un idéal. Tolstoï fait de même dans ses romans : il est Lévine dans Anna Karénine.
B

Développer l'esprit critique du lecteur

  • La rencontre avec des personnages et des auteurs est surtout l'occasion pour le lecteur de développer son esprit critique. Il découvre de nouvelles façons d'écrire et de penser. Ainsi, dans Le Dernier jour d'un condamné, Victor Hugo place le lecteur dans la tête d'un condamné à mort et le pousse à réfléchir sur la pratique de la guillotine. Les philosophes des Lumières, et Voltaire particulièrement dans ses contes philosophiques, livrent des messages à travers leurs romans qui entraînent la réflexion du lecteur.
  • Le roman est aussi une rencontre : celle du lecteur avec l'auteur. On aime ou on n'aime pas un livre non seulement en fonction des personnages et de l'histoire, mais aussi en fonction du style, de la façon d'écrire de l'auteur. Ainsi, l'écriture tient une place très importante dans l'attrait qu'un roman peut avoir sur le lecteur. Zola nous plonge dans un univers souvent sombre marqué par le lyrisme. Victor Hugo aime les mondes dichotomiques et écrit d'une plume mystique. Balzac use de beaucoup d'ironie. Proust fait de très longues phrases. Marguerite Duras au contraire compose des phrases très courtes, son style est apparemment très simple.
  • Chaque écrivain a par ailleurs sa propre idée sur la façon de construire un personnage. Ainsi, Zola veut utiliser la science et la médecine pour inventer ses personnages alors que Marcel Proust souligne d'abord l'importance de la psychologie.

Dans les romans contemporains, le personnage reprend beaucoup d'importance, alors qu'avec le Nouveau Roman il avait été placé au second plan. Il est souvent au cœur de l'intrigue. Il n'est pas rare que le lecteur soit plongé dans ses pensées. C'est ce qui fait l'intérêt de certains classiques, comme La Princesse de Clèves ou Les Liaisons dangereuses.
Toutefois, la littérature ne présente pas un intérêt uniquement car elle peut nous mettre à la place d'un personnage. Chaque lecteur a sa raison pour lire, mais l'intrigue, les idées de l'auteur ou encore son style sont des composants essentiels du roman. On lit pour être autre, pour vivre autrement, pour apprendre, pour rêver. Chaque lecteur a sa propre lecture, et chaque roman a sa propre force. Lire, c'est découvrir un nouveau regard porté sur le monde, réfléchir à la condition humaine, et donc développer son esprit critique.

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