Quelle est la différence entre un incipit progressif et un incipit in medias res ?
Qu'est-ce qui caractérise l'incipit in medias res sur le plan de la narration ?
Quel est l'intérêt de l'incipit in medias res ?
Que peut-on dire à propos de l'incipit progressif ?
Quels sont les éléments contextuels transmis par l'incipit progressif ?
De quel genre l'incipit in medias res est-il hérité ?
À l'origine, le mot "incipit" désignait la première phrase d'un roman. Il répond à trois caractéristiques : il informe en mettant en place les lieux, le temps et les personnages de l'action. Il intéresse par divers procédés techniques comme l'entrée in medias res ou les figures de style. Il noue le contrat de lecture avec le lecteur en lui indiquant le genre narratif du roman, le style, le ton et le niveau de langage employés.
L'incipit progressif annonce le décor, les personnages, la temporalité et les circonstances de l'action au fur et à mesure que le narrateur avance dans le récit au début du roman. Il ne donne pas les réponses à toutes les questions. Il s'agit de l'incipit "classique" consistant à favoriser la compréhension du lecteur par un cadre spatio-temporel le plus souvent. C'est le cas de l'incipit de L'Éducation sentimentale de Flaubert :
"Le 15 septembre 1840, vers six heures du matin, la Ville-de-Montereau, près de partir, fumait à gros tourbillons devant le quai Saint-Bernard. Des gens arrivaient hors d'haleine ; des barriques, des câbles, des corbeilles de linge gênaient la circulation ; les matelots ne répondaient à personne ; on se heurtait ; les colis montaient entre les deux tambours, et le tapage s'absorbait dans le bruissement de la vapeur, qui, s'échappant par des plaques de tôle, enveloppait tout d'une nuée blanchâtre, tandis que la cloche, à l'avant, tintait sans discontinuer."
L'incipit in medias res, lui, apporte les éléments d'information aux lecteurs, de manière détournée : les circonstances de l'action romanesque sont évoquées par le dialogue des personnages, se racontant entre eux des événements passés. Le roman entraîne donc les lecteurs dans le feu de l'action avant de leur donner les paramètres de celle-ci. Cette technique est suivie d'un retour en arrière explicatif. On y a recours quand les personnages sont nombreux et que le sujet est long à expliquer. Héritée du genre épique, la technique a été notamment utilisée au cinéma par le flashback. C'est ce qu'illustrent aussi de nombreux romans et nouvelles du XXe siècle. L'avantage de ce type d'incipit est qu'il crée une accroche plus susceptible de capter l'attention du lecteur en le déroutant. Le romancier crée ainsi un certain suspens. On peut citer l'exemple de l'incipit de Jacques le Fataliste de Diderot :
"Comment s'étaient-ils rencontrés ? Par hasard, comme tout le monde. Comment s'appelaient-ils ? Que vous importe ? D'où venaient-ils ? Du lieu le plus prochain. Où allaient-ils ? Est-ce que l'on sait où l'on va ? Que disaient-ils ? Le maître ne disait rien ; et Jacques disait que son capitaine disait que tout ce qui nous arrive de bien et de mal ici-bas était écrit là-haut."
- L'incipit progressif est l'annonce des circonstances de l'action romanesque en tout début de roman dans le corps du récit.
- L'incipit in medias res ménage le suspense par une annonce implicite des circonstances à l'aide des dialogues entre personnages.