On donne le poème "Elsa" de Louis Aragon :
Elle a rejoint la nuit dans ses bras adorables
Je vois sa main bouger Sa bouche Et je me dis
Qu'elle reste pareille aux marches du silence
Qui m'échappe pourtant de toute son enfance
Dans ce pays secret à mes pas interdit
Je te supplie amour au nom de nous ensemble
De ma suppliciante et folle jalousie
Ne t'en va pas trop loin sur la pente choisie
Je suis auprès de toi comme un saule qui tremble
J'ai peur éperdument du sommeil de tes yeux
Je me ronge le cœur de ce cœur que j'écoute
Amour arrête-toi dans ton rêve et ta route
Rends-moi ta conscience et mon mal merveilleux.
Comment se manifeste la présence du poète ?
- Le pronom personnel de première personne du singulier s'exprime sous plusieurs formes : le "nous" du couple amoureux, et le "je" poétique ("je", "m'"et "me").
- Le poète s'adresse directement à l'être aimé en l'apostrophant grâce au "tu" : la voix se fait entendre dans ce dialogue.
- Le poème est également parcouru de modalités que l'on devine exclamatives malgré l'absence de ponctuation, comme dans les injonctions ("ne t'en va pas").
Les pronoms personnels de première personne et le dialogue amoureux avec la femme aimée soulignent la présence du poète.
Quels sont les sentiments évoqués ? Justifier la réponse.
- Le poème se construit autour d'une étrange jalousie du poète : celle qu'il éprouve quand la femme qu'il aime lui échappe au cœur du sommeil et des rêves.
- Le sommeil de la femme aimée qui la rend inaccessible au poète crée chez lui une angoisse : "j'ai peur éperdument du sommeil de tes yeux".
- C'est enfin l'amour fou qu'il éprouve pour cette femme, qu'il appelle "Amour" par deux fois, qui est au cœur du poème.
Les sentiments évoqués sont la jalousie, l'angoisse et l'amour.
Quelle(s) figure(s) de style le poète utilise-t-il ?
- Le poète file la métaphore du sommeil et du rêve comme un "pays secret" dans lequel la femme s'enfuit, échappe au poète.
- Parlant de la femme endormie qu'il observe, il décrit son corps en se focalisant sur des parties ("sa main", "sa bouche"), à la manière du blason poétique.
- Enfin, "mon mal merveilleux", qui décrit sans doute l'amour sans borne éprouvé par le poète, rapproche, au sein d'un oxymore, deux réalités a priori opposées et qui montrent la nature contradictoire d'un amour si fort qu'il peut engendrer de la souffrance.
Les figures de style utilisées sont la métaphore, la comparaison et l'oxymore.