Dans quelles phrases repère-t-on des figures d'analogie ou de substitution ?
« (1) Elle était entrée en effaçant les épaules là même où il n'y avait aucune foule à fendre et personne à laisser passer, restant exprès dans le fond, de l'air d'y être à sa place, comme un roi qui fait la queue à la porte d'un théâtre tant que les autorités n'ont pas été prévenues qu'il est là. [...] (2) Elle observait la mimique de sa voisine mélomane, mais ne l'imitait pas. (3) Ce n'est pas que, pour une fois qu'elle venait passer cinq minutes chez Mme de Saint-Euverte, la princesse des Laumes n'eût souhaité, pour que la politesse qu'elle lui faisait comptât double, de se montrer le plus aimable possible. (4) Mais par nature, elle avait horreur de ce qu'elle appelait « les exagérations » et tenait à montrer qu'elle « n'avait pas à » se livrer à des manifestations qui n'allaient pas avec le « genre » de la coterie où elle vivait. [...] »
Marcel Proust, Du côté de chez Swann, 1913
Une figure d'analogie se trouve à la phrase 1 : « Elle était entrée en effaçant les épaules là même où il n'y avait aucune foule à fendre et personne à laisser passer, restant exprès dans le fond, de l'air d'y être à sa place, comme un roi qui fait la queue à la porte d'un théâtre tant que les autorités n'ont pas été prévenues qu'il est là. » Comme indiqué par l'outil comparatif utilisé, « comme », il s'agit d'une comparaison. L'entrée de l'héroïne de l'extrait est comparée à celle d'un roi.
La comparaison est la mise en relation de deux éléments (le comparé et le comparant) qui ont un point commun, à l'aide d'un outil comparatif (« comme », « ainsi que », « semblable à », « pareil », « ressembler », etc.).
« (1) Il neigeait. (2) On était vaincu par sa conquête.
(3) Pour la première fois l'aigle baissait la tête.
(4) Sombres jours ! l'empereur revenait lentement,
Laissant derrière lui brûler Moscou fumant. »
Victor Hugo, « L'Expiation », Les Châtiments, 1852
Une figure d'analogie se trouve à la phrase 3 : « Pour la première fois l'aigle baissait la tête ». Il s'agit d'une allégorie de l'empire napoléonien.
L'allégorie est la représentation d'une idée ou d'une notion abstraite de manière concrète.
« (1) Mais Paris est un véritable océan. (2) Jetez-y la sonde, vous n'en connaîtrez jamais la profondeur. (3) Parcourez-le, décrivez-le : quelque soin que vous mettiez à le parcourir, à le décrire ; quelques nombreux et intéressés que soient les explorateurs de cette mer, il s'y rencontrera toujours un lieu vierge, un antre inconnu, des fleurs, des perles, des monstres, quelque chose d'inouï, oublié par les plongeurs littéraires. »
Honoré de Balzac, Le Père Goriot, 1835
Une figure d'analogie se trouve à la phrase 1 (« Mais Paris est un véritable océan ») et à la phrase 3 (« quelques nombreux et intéressés que soient les explorateurs de cette mer » ; « quelque chose d'inouï, oublié par les plongeurs littéraires »). Il s'agit d'une métaphore filée. Paris est ici comparé à un océan (comparant sans outil comparatif).
La métaphore est une analogie entre un comparé et un comparant sans outil comparatif. La métaphore est filée quand elle se poursuit sur plusieurs lignes ou vers.
« (1) Du bout de l'horizon accourt avec furie
Le plus terrible des enfants
Que le Nord eût portés jusque-là dans ses flancs.
(2) L'Arbre tient bon ; le Roseau plie.
(3) Le vent redouble ses efforts,
Et fait si bien qu'il déracine
Celui de qui la tête au Ciel était voisine
Et dont les pieds touchaient à l'Empire des Morts. »
Jean de La Fontaine, « Le Chêne et le Roseau », Fables, 1668
Une figure de substitution se trouve à la phrase 1 (« Le plus terrible des enfants que le Nord eût portés jusque-là dans ses flancs ») et à la phrase 3 (« Celui de qui la tête au Ciel était voisine et dont les pieds touchaient à l'Empire des Morts »). Il s'agit, dans les deux cas, d'une périphrase. La première désigne le vent, la seconde désigne l'Arbre, le Chêne.
La périphrase est la substitution d'un terme par une expression plus développée.
« (1) La mer perfide hululait doucement: ses molles lèvres vertes baisaient sans relâche, à féroces baisers, la dure mâchoire des roches.
(2) Il essaya de se dresser: ses jambes, des algues ! (3) Ses bras, des fumées d'embruns ! (4) Il ne commandait plus qu'à ses paupières et, elles étaient ouvertes sur la désolation du ciel ! (5) Il ferma les yeux. (6) - Le désespoir se mit à lui manger le foie. »
Jean Giono, Naissance de l'Odyssée, © Éditions Grasset, 1930
Une figure d'analogie se trouve à la phrase 1 (« ses molles lèvres vertes baisaient sans relâche, à féroces baisers, la dure mâchoire des roches ») et à la phrase 6 (« Le désespoir se mit à lui manger le foie »). Il s'agit, dans les deux cas, d'une personnification. La première personnifie la mer et les roches qui s'embrassent, la seconde personnifie le désespoir qui mange.
La personnification est un procédé qui donne des traits humains à un objet ou à un élément concret, inanimé.